Cession totale du Crédit du Maroc à Holmarcom
Après la vente, au milieu de la première décennie des années 2000, de ses dépendances ouest-africaines à Attijariwafa Bank (première banque du Maroc et d'Afrique du Nord), Crédit Agricole renonce à l’une de ses dernières filiales africaines. Confirmant des projets qui avaient filtré dès l'automne dernier (relire ci-dessous bulletin #149), le groupe bancaire français vient de signer fin avril un accord de cession totale de sa participation de 78,7 % dans le capital de la banque commerciale cotée Crédit du Maroc, au profit du conglomérat marocain Holmarcom. Le groupe familial diversifié, dirigé depuis 1993 par Mohamed Hassan Bensalah, prendra d’abord une participation de 63,7 % (50,9 % via sa holding Holmarcom Finance Company et 12,8 % via sa filiale AtlantaSanad Assurance), d’ici la fin de l’année en cours, avant d’acquérir les 15 % restants, dix-huit mois après la première tranche. La transaction - dont le montant n'a pas été divulgué - s’inscrit dans le cadre de la construction d’un pôle financier intégré avec une vocation panafricaine, amorcée en 2019 par Holmarcom afin de se renforcer dans le secteur des assurances, tout en diversifiant ses métiers financiers et en accélérant son expansion en Afrique subsaharienne.
Pendant cette phase de transition, Crédit Agricole continuera à accompagner Crédit du Maroc. L'opération devrait avoir un impact positif d’environ dix points de base (bps) sur ses ratios Common Equity Tier1 (CET1). Qu’en est-il de sa présence sur le continent africain ? La banque française reste active au Maghreb, avec Crédit Agricole CIB Algérie (banque de financement et d'investissement), CA Egypt (banque de proximité à l'international), SGAM AI Egypt (gestion d'actifs) et plusieurs entités au sein du royaume chérifien : Wafasalaf (crédit à la consommation), Wafa Gestion (banque de financement et d'investissement) et Amundi Investment Maroc (gestion d'actifs).
La Société Générale : pas de retrait, mais…
Les médias se sont fait l’écho de rumeurs au sujet de la Société Générale, fortement affectée par les sanctions occidentales contre la Russie (où elle contrôle Rosbank) et qui aurait donc amorcé une réflexion quant à des ventes de certaines de ses filiales africaines. Bien qu’elle démente formellement tout retrait du continent - « Ce n’est pas dans l’ordre du jour » - l’institution bancaire, qui demeure la première banque internationale en Afrique de l’Ouest, a confirmé l’arrêt des activités de son service de mobile money africain Yup, lancé cinq ans auparavant, en partenariat avec l’éditeur francilien de logiciels bancaires TagPay (rebaptisé depuis Skaleet).
En attendant la réaffectation « au cas par cas » des ressources humaines dans d’autres filiales, une centaine de salariés se retrouvent au chômage technique en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Burkina Faso, au Cameroun, en Guinée, au Ghana et à Madagascar. Les quelque deux millions de clients concernés dans ces sept marchés doivent retirer leurs fonds avant le 31 mai prochain. Malgré le succès rencontré par cette solution, notamment en Côte d’Ivoire (plus de 2 500 points de vente en 2019, deux ans seulement après son lancement, puis le double fin 2021) et au Cameroun (création de cinq mille distributeurs alors que l’objectif initial était de huit mille pour l’ensemble des marchés), Yup s’est retrouvée structurellement déficitaire, en particulier à cause de la guerre des prix menée par ses concurrents.
À contre-courant de la plupart de ses consœurs internationales, la Société Générale avait pourtant, à partir de 2015, considérablement renforcé son réseau et décentralisé une grande partie de ses opérations en Afrique, pariant sur la croissance du continent et le développement de ses entreprises. Bénéficiant d'un ancrage historique solide (plus d'un siècle au Maroc, quatre-vingts ans en Côte d’Ivoire, soixante ans au Cameroun et au Sénégal), la banque française avait par exemple créé en 2015 Société Générale Togo et Societe Generale Moçambique (suite à une prise de participation majoritaire dans Mauritius Commercial Bank Mozambique).
BNP Paribas : poursuite de la dynamique de cessions entamée il y a trois ans
Le premier groupe bancaire français en termes d’actifs, fort d’un bénéfice net de plus de 9,5 Md€ en 2021, compte encore aujourd’hui sept implantations en Afrique, dont la Côte d’Ivoire en Afrique de l’Ouest francophone. Pour renforcer sa position de géant mondial, BNP Paribas mise toutefois désormais sur l’Europe et l’Asie. « En Afrique, nous avons adopté une stratégie ciblée et continuons à nous renforcer là où les caractéristiques du marché correspondent bien à nos forces et aux conditions souhaitées en termes de développement et de maîtrise des risques », a déclaré la banque tricolore. Au Sénégal, elle a engagé en février dernier la cession de sa filiale sénégalaise détenue à 54,11 %, la Banque Internationale pour le Commerce et l’Industrie du Sénégal (BICIS). Le mandat aurait été confié à Rothschild & Co. Au préalable, elle avait déjà renoncé à ses filiales aux Comores, au Gabon, au Mali, en Guinée, au Burkina Faso et en Tunisie (relire ci-dessous).
Standard Chartered Bank réduit la voilure en Afrique
Le groupe bancaire britannique coté sur les Bourses de Londres et Hong Kong a officialisé mi-avril son intention de céder plusieurs de ses activités, dont cinq filiales en Afrique (au Cameroun, en Gambie, en Sierra Leone, au Zimbabwe et en Angola), deux au Moyen-Orient (Jordanie et Liban) et les segments banque commerciale, de détail et banque privée en Côte d’Ivoire et en Tanzanie. L’ensemble du périmètre cédé n’a généré en 2021 qu'environ 1 % du revenu total du groupe et une proportion similaire du bénéfice avant impôt. « Nous nous concentrons sur les opportunités de croissance les plus importantes tout en simplifiant nos activités. Nous restons enthousiasmés par un certain nombre d'opportunités que nous voyons dans la région Afrique Moyen-Orient, comme l'illustrent nos nouveaux marchés, mais nous restons disciplinés dans notre évaluation des domaines dans lesquels nous pouvons fournir des rendements considérablement améliorés pour les actionnaires », a expliqué Bill Winters, directeur général du groupe.
Ni le calendrier de ces transactions ni l’identité des acquéreurs potentiels n’ont été dévoilés ce jour. Le Cameroun, où Standard Chartered Bank avait pris pied en 1986, constituait son plus grand marché africain ; mais en dépit de la décision, il y a quelques années, de se concentrer uniquement sur la clientèle corporate, son activité n’avait pas réellement décollé. La banque londonienne restera présente sur onze marchés africains, dont le Ghana et le Kenya où ses filiales sont cotées sur les marchés financiers locaux, mais aussi le Nigeria, l'Afrique du Sud et l'Égypte, qui peuvent se targuer des meilleurs produits intérieurs bruts (PIB) de la région.
Et aussi…
Le groupe bancaire britannique Barclays a cédé en avril, à des investisseurs institutionnels, 63 millions d’actions, soit 7,4 % de parts de capital détenues au sein du sud-africain Absa Bank (ex Barclays Africa Group), générant un produit brut d’environ 635 M€ (10,33 MdZAR). Sa participation est ainsi passée de 15 % du capital à 7,4 %. Il s’agit d’une nouvelle étape dans le processus de désengagement de la banque, amorcé en 2016 avec une réduction progressive de ses actions (62,3 % de parts en 2013 contre 15 % en 2020).