Banques : Banque d’investissement pour le commerce et l’industrie du Mali / Atlantic Financial Group / BNP Paribas
Comme annoncé dans le bulletin #54, BNP Paribas a entrepris de solder sa présence dans plusieurs pays africains où il est confronté à des tensions avec les partenaires locaux et dont les actifs sont jugés « non essentiels ». Après la cession notamment de ses participations dans les filiales tunisiennes (relire bulletin #60) et gabonaises (bulletin #87), le groupe coté français a trouvé un accord avec Atlantic Financial Group (AFG), le groupe financier de l’ivoirien Bernard Koné Dossongui, pour le contrôle de trois de ses filiales africaines historiques, à savoir la Banque d’Investissement pour le Commerce et l’Industrie du Mali (BICIM), la Banque pour l’Industrie et le Commerce aux Comores (BICC) et la Banque Internationale pour le Commerce et l’Industrie au Gabon (BICIG). Cette dernière a fait l’objet d’un accord entre AFG et le Fonds Gabonais d’Investissements Stratégiques (FGIS), détenteur de 47,04 % du capital suite au rachat de l’intégralité des parts de BNP Paribas. (voir fiches des opérations avec les conseils sur CFNEWS). Le groupe bancaire tricolore détenait 85 % de BICIM, qui avait fermé la quasi-totalité de ses agences ces dernières années, après deux décennies d’activité. En matière de reprise et de gestion de filiales bancaires, AFG peut se targuer d’un track record éprouvé avec notamment la reprise réussie des ex CIC et Barclays en Côte d’Ivoire, et plus récemment au Cameroun de l’ex Amity Bank, devenue Banque Atlantique Cameroun. Une fois ces opérations finalisées, le groupe ivoirien contrôlera quatre banques et quatre compagnies d’assurances, confirmant ainsi sa volonté de consolider sa présence en Afrique centrale et de se redéployer en Afrique de l’Ouest et dans l’Océan Indien, avec une nouvelle offre de service digitale capitalisant sur l’expérience du groupe en matière de technologie. Un temps favori à la reprise de BNP Paribas en Afrique de l’Ouest, le consortium formé par l’assureur panafricain Sunu, associé au fonds d’investissement AfricInvest, a jeté l’éponge l’an dernier, estimant le montant de la transaction réclamé par le groupe français trop élevé (100 M€ d’après le média Jeune Afrique). L’identité du repreneur des filiales au Burkina et en Guinée demeure en revanche inconnue.
Focus : le point sur la pandémie en Afrique
Alors que les articles s’interrogeant sur la non-réalisation du scénario catastrophe envisagé en Afrique fleurissent de plus belle, le continent recense à ce jour plus de 88 000 cas confirmés et 2 800 décès. La plupart des pays ont entrepris d’alléger les mesures prises, mais les efforts ne se relâchent pas pour tenter d’enrayer la crise sanitaire et ses retombées socio-économiques.
La solidarité internationale
En qualité de président de la Task Force mise sur pied par l'Union Africaine (relire bulletin #88), Tidjane Thiam a participé lundi dernier à des discussions sur une probable suspension du service de remboursement de la dette due par des pays africains à leurs créanciers privés internationaux. Cette rencontre en mode vidéoconférence entre les gouvernements africains (représentés par la Commission économique pour l'Afrique) et le groupe de près de cent créanciers privés internationaux de l'Afrique (représenté par l'Institute for International Finance, une association basée à Washington D.C.) avait pour principal objectif de comprendre l’éventail des options possibles, en plus de souligner l’importance de maintenir l’accès aux marchés privés aux pays après la crise. Une solution globale comme l'ont décidé les chefs d’État du G20 pour la dette bilatérale ne sera pas possible. Les participants vont réfléchir à des solutions permettant de fournir de la liquidité aux pays africains, tout en organisant le remboursement de leurs dettes envers les créanciers et en préservant leur accès futur aux marchés des capitaux.
L’Égypte et les Seychelles sont les derniers pays africains en date à bénéficier d’un financement du Fonds Monétaire International (FMI), à hauteur respectivement de 2,7 Md€ (2,7 Md$) et 28,5 M€ (31,2 M$).
Le gouvernement américain, par l’intermédiaire de sa structure spécialisée, le Centre pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), octroie une subvention financière d’une valeur de 34 M€ (37 M$) en faveur de l’Éthiopie pour mieux lutter contre la propagation du virus à travers notamment le renforcement des soins cliniques et des laboratoires pour les tests à grande échelle.
La Société Financière Internationale (SFI ou IFC)et Proparco vont collaborer plus étroitement pour créer des marchés, mobiliser les investissements du secteur privé et soutenir la reprise économique dans les pays en développement dans le contexte de la crise.
L’alliance des acteurs internationaux et locaux
En Côte d’Ivoire, la gestion de trois des quatre fonds d'urgence affectés à la lutte contre la covid-19, qui totalisent 793 M€ (520 MdXOF), vient d’être confié par le président Alassane Ouattara à un trio de consultants constitué de Deloitte, EY et KPMG. De manière similaire, le ministère ivoirien de l’Économie et des Finances a mandaté la Deutsche Bank et la Société Islamique pour l’Assurance des investissements et du Crédit à l’Exportation (SIACE) pour réaliser la construction et l’équipement de deux nouveaux hôpitaux régionaux ainsi que cinq nouvelles unités médicales dans cinq hôpitaux du pays.
La Oikocredit International Support Foundation (ISUP), une fondation néerlandaise, lance un fonds de solidarité de 25 K€ contre le coronavirus pour soutenir les clients finaux de ses partenaires de microfinance, à savoir les petites entreprises d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine qui peinent à trouver les moyens de se conformer aux nouvelles réglementations en matière d'hygiène et d'assainissement.
Les actions entreprises par les dirigeants
Le Togo a émis jeudi ses premiers bons sociaux covid-19, levant 162 M€ (108 MdXOF) sur le marché financier sous-régional de l’Union Économique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA). Cet outil financier vise notamment à permettre aux États de faire face aux dépenses immédiates liées à la lutte contre la maladie.
Le Cameroun ambitionne de constituer un fichier de fournisseurs d’équipements et expertises pour la lutte contre le coronavirus. Le secrétaire d’État à la Santé publique chargé de la lutte contre les épidémies et les pandémies, Alim Hayatou, a lancé jeudi un appel à manifestation d’intérêt, en vue de la préqualification des entreprises de ventes et location de matériels roulants, des compagnies de génie civil, des consultants, des fournisseurs de biens et équipements médicaux et non médicaux, mais aussi de mobiliers médicaux, de consommables médicaux et autres équipements de protection individuelle. Dans ce pays, pouvoir et opposition s’accusent mutuellement de vouloir surfer sur la crise. Six membres de l’opération de solidarité « Survie-Cameroun », lancée par l’opposant Maurice Kamto, ont ainsi été arrêtés alors qu’ils distribuaient gratuitement des masques et du gel hydroalcoolique, sous prétexte de « distribution illégale » et de « rébellion en bande ».
Les initiatives des acteurs locaux
L’une des actions les plus emblématiques de la semaine est sans doute le lancement officiel, par un collectif d’entrepreneurs congolais réunis au sein du Lumuba Lab, de la solution Civic-tech Lisungi.org, la première plateforme d’entraide mise en ligne en RDC dans le cadre de la lutte contre l’épidémie. Symbole de la mobilisation de la communauté tech congolaise, cet outil technologique vise à démultiplier le potentiel d’action de la société civile pour venir en aide aux plus démunis. Inspirée de l’initiative citoyenne et open source enpremièreligne.fr, la plateforme représente une solution immédiate et concrète aux problèmes de tous les personnels clés de la lutte contre le virus (professionnels de santé, agents de police, salariés de la distribution, etc.). Elle s’appuiera sur le réseau logistique, de stockage et de distribution de plusieurs acteurs, issus à la fois de la sphère religieuse et de la sphère économique.
Un Kényan de neuf ans fait beaucoup parler de lui actuellement sur les réseaux sociaux. Cet ingénieur en herbe du nom de Steeve Wakumota a en effet imaginé et construit une machine pour se laver les mains sans transmettre de germes, grâce à deux pédales, l’une pour activer le distributeur de savon, et l'autre pour faire basculer un bidon d'eau pour les rincer. Cette invention, inspirée d’un programme éducatif télévisé montant comment assembler des automobiles miniatures, est désormais utilisée par tous les habitants de son village.
Nouvelle structure : Bridges Builder (France / Afrique / Europe)
Une nouvelle structure type banque d'affaires a vu le jour en Afrique pour permettre aux investisseurs européens de financer des start-up africaines, sous la houlette de l’entrepreneure marocaine Sanaa Berthié, forte de plus de quinze ans d’expérience dans le secteur des Technologies de l’information et des Télécommunications : Bridges Builder. Grâce à cette plateforme d’intermédiation et de conseil, véritable rampe de lancement des jeunes pousses les plus prometteuses du continent, ces dernières bénéficieront d’un accompagnement de A à Z pour les aider à monter leur business model, leur stratégie de vente et de distribution, sans oublier la recherche de financements. La nouvelle entité ambitionne notamment de recenser l’intégralité des start-up du continent. Pour les investisseurs européens, qu’ils soient bailleurs de fonds, Business Angels, acteurs du Private Equity ou du Corporate Finance, Bridges Builder leur fournira des alternatives d’investissements ultra-rentables dans des secteurs porteurs : e-commerce, agritech, e-learning, e-santé, e-energie, e-money, e-gouvernement, smart city. Le risque d’investissement sera réduit grâce à des données d’aide à la décision à la fois juridiques, macroéconomiques et financières.
Fonds - Technologies : Novastar Ventures / (Maurice / Kenya / Nigeria / Afrique de l’Est et de l’Ouest)
Le VC Novastar Ventures, basé à Maurice, au Kenya et au Nigeria, boucle son deuxième véhicule à 99 M€ (108 M$). Alors que son prédécesseur se dédiait exclusivement aux entreprises est-africaines, Novastar Ventures Africa Fund II (NVAF II) étendra sa portée géographique à l’Afrique de l’Ouest. Il a d’ores et déjà pris des participations, seul ou en co-investissement, dans le capital de deux sociétés technologiques ouest-africaines, mPharma au Ghana et Max.ng au Nigeria. Sa stratégie consistera à soutenir des entreprises qui mettent sur le marché des produits et services innovants et sont susceptibles d’étendre leur portée dans plusieurs économies africaines. Cette levée, qui a vu la participation de plusieurs institutions financières de développement ayant déjà contribué au premier véhicule de Novastar, porte à plus de 165 M€ (180 M$) le total des fonds mobilisés à travers ses deux véhicules.
Agroalimentaire : Export Trading Group /(Kenya / Afrique / Finlande)
Export Trading Group (ETG), une chaîne intégrée de gestion et de transformation de produits agricoles présente dans vingt-six pays africains, bénéficie d’un apport financier de 13,7 M€ (15 M$) de Finnfund, une institution de développement finlandaise, en contrepartie d’une prise de participation dont le pourcentage n’a pas été divulgué. Cette opération permettra au groupe agro-industriel né en 1967 au Kenya de renforcer ses opérations de négoce et de transformation de produits agricoles principalement au Malawi, au Mozambique et en Tanzanie. Trois autres institutions financières de développement détiennent des parts dans le capital du groupe kényan qui couvre l’ensemble de la chaîne de valeur agricole depuis la production jusqu’à la distribution, et qui est aujourd’hui actif en Afrique subsaharienne, mais aussi en Asie du Sud-Est, au Moyen-Orient et en Europe.
Événements :
- 20 mai (9h30) : webinaire sur les scénarios de sortie de crise en Afrique du Sud organisé par le Comité Afrique de MEDEF international, avec comme invité Olivier Laouchez, co-fondateur et P-dg du groupe de médias Trace, Olivier Granet, managing partner chez Kasada Capital Management et Richard Kiplagat, chief operating officer chez Africa Practice.
- 20 mai (11-12h) : webinaire « Algérie : point sur la situation sanitaire, sociale et économique » organisé par le Comité d'échanges Afrique-France et la CCI Paris Île-de-France. Plusieurs thèmes seront abordés dans le contexte de la pandémie : la chute du prix du pétrole (Brent), l’incertitude face à l’avenir, la capacité de l'Algérie à agir en cette période de crise sanitaire ? Cet événement est organisé en collaboration avec la Chambre de commerce et d’industrie algéro-française (CCIAF). Il sera animé par Nacéra Amari Police, chef de projets internationaux à la CCI Paris Ile-de-France, Halim Ammar Khodja, directeur adjoint de la CCI algéro-française, et Akram Hamouda, responsable de la veille réglementaire à la CCI algéro-française.
- 26-28 mai : webinaire international organisé par Think & do Tank Team RM en partenariat avec la Confédération des Institutions Financières pour l’Afrique de l’Ouest (CIF), le groupe Ecobank et la Fondation Louis Lamothe de Haïti, avec pour objectif de préparer les acteurs de l’économie réelle dans les pays africains (et plus largement du Sud) à la résilience face aux conséquences économiques de la crise.
- 28 mai : webinaire consacré aux enjeux de la digitalisation, aux nouveaux produits et services numériques, ainsi qu’aux moyens concrets de se digitaliser pour les acteurs de l'inclusion financière, les IMF, confrontées à la concurrence des fintech, des opérateurs de réseaux mobiles et d'autres nouveaux acteurs. L’e-conférence évoquera également la crise actuelle et les opportunités que peut apporter la transformation digitale dans ce contexte, notamment en augmentant la résilience des acteurs de l'inclusion financière et en offrant à tous des services financiers fiables.
Et aussi...
- Après avoir été amputée des actifs situés en Algérie, qui constituaient le volet le plus important en termes de production de pétrole et de gaz (relire bulletin #91), l’acquisition des actifs africains d’Anadarko par Total se réduira finalement aux actifs situés au Mozambique et en Afrique du Sud (voir fiche de l’opération sur CFNEWS IMMO & INFRA). Le Purchase and Sale Agreement (SPA) signé en août 2019 par Total et Occidental Petroleum prévoyait en effet que la cession des champs de Jubilee et de TEN, au Ghana, soit conditionné à la réalisation de la cession des actifs algériens.
- La COmpagnie FINancière Africaine (COFINA) vient de signer un partenariat d’un montant de 12,5 M€ avec FMO, la banque néerlandaise de développement, pour financer des clients de ses filiales au Sénégal (7,5 M€) et en Côte d’Ivoire (5 M€). Ce rapprochement permettra au groupe panafricain de renforcer son positionnement dans la mésofinance sur le continent.
- L'accord de libre-échange continental africain n'entrera pas en vigueur le 1ᵉʳ juillet prochain comme prévu en raison de la pandémie. La fermeture complète des frontières par une trentaine de pays empêche le secrétariat de la Zone de libre-échange continentale africaine de faire avancer les pourparlers, ce qui retardera les négociations d'au moins deux mois et demi.
- Anciens employés de Jumia Cameroun, Simon Mbelek et Donatien Forbin viennent de créer leur propre société, Brand Spark, qui a vocation à accompagner les entrepreneurs et les entreprises se lançant dans le commerce électronique au Cameroun, et plus largement dans la sous-région.
- D’ici l’an prochain, le groupe industriel coté Engie envisage de réduire la voilure dans vingt-cinq pays, selon un plan global de cessions d’actifs d’un montant de 4 Md€, et de se retirer dans ce cadre d’une douzaine pays africains.
- La plateforme égyptienne de commerce en ligne Brimore, qui permet à des PME d’écouler leurs produits via un réseau de distributeurs, réunit 3,2 M€ (3,5 M$) à l’occasion d’un tour de table dirigé par le VC Algebra Ventures.
Bonne fin de semaine et à mardi prochain.
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