Le secondaire s’impose de plus en plus comme une quatrième voie, alternative aux IPO, cessions à un stratégique et nouveaux buyout. MBO+ l’a récemment emprunté pour ses participations LT et Osmaïa. Astorg, qui s’y est déjà essayé en 2022 avec IQ-EQ dans le cadre d’une opération de 1,3 Md€, s’adonne de nouveau à cette pratique pour Normec. Le gérant paneuropéen monte un fonds de continuation afin de poursuivre l’aventure au capital de ce groupe néerlandais de test, inspection, compliance et certification (TICC). Il en avait pris le contrôle en 2020, en relayant Summit Partners et en s’associant au management emmené par Joep Bruins, le fondateur, qui conservait 16 % des titres. Après avoir quadrupler la taille de cette entreprise, notamment grâce à 40 build-up, pour lui permettre d’afficher 470 M€ de chiffre d’affaires pour environ 90 M€ d’Ebitda en 2023, Astorg s’est entouré de Jefferies et Lazard afin de marquer un point d’étape. La solution du secondaire est apparue comme la plus créatrice de valeur. L’investisseur a donc monté Normec Continuation Fund, en s’appuyant sur CVC Secondary Partners, Pantheon, Lexington Partners et Eurazeo. Au-delà de l’apport de ces spécialistes du secondaire, Astorg réinvestit via son fonds VII aux côtés de LPs (nouveaux et historiques de la société de gestion) et du management. Ce fonds, « sursouscrit » est doté de 1,4 Md€.
Refinancement des 580 M€ de dette
Cette somme comprend les fonds nécessaires pour racheter Normec – qui se trouverait valorisée entre 1,5 Md€ et 2 Md€, selon nos estimations -, ainsi que des capitaux additionnels pour financer la prochaine étape de la croissance du néerlandais. « Nous avons parfaitement déroulé le plan stratégique initial entre 2020 et aujourd’hui, évoque Benjamin Cordonnier, associé business services et head of portfolio performance. Nous avons estimé, en accord avec le management, que le fonds de continuation était la meilleure option pour donner le temps et les capitaux nécessaires à la société pour poursuivre son ambitieux développement. » Le refinancement de la cible n’est généralement pas obligatoire dans le cadre d’un continuation fund car ce type d’opération n’est pas considéré comme un changement d’actionnaire de contrôle. Cependant, Astorg a préféré remettre à plat le passif de sa participation. Ainsi, les 580 M€ de dettes existantes ont été remboursés via la levée de 565 M€ de term loan B et 26 M€ puisés dans la trésorerie de la société, selon S&P. A cette nouvelle facilité s’ajoutent 120 M€ de RCF et 100 M€ de ligne de capex. L’agence de notation, qui attribue la note de B à Normec, estime que le levier devrait tourner autour des 6,6 fois l’Ebitda du groupe à fin 2023. Ce levier exclut l’endettement du fonds de continuation. Si, à date, ce fonds est abondé à 100 % en equity, Astorg devrait, dans un futur proche, y insérer du levier.
Cap sur l’Amérique du Nord
Une double couche de dette qui doit être supportée par la croissance et la génération de cash de l’entreprise néerlandaise forte de 5 000 collaborateurs. À date, son Ebitda run rate tournerait autour des 110 M€, contre 20 M€ en 2020, et il pourrait tangenter les 130 M€ d’ici la fin de l’année. S&P estime par ailleurs que Normec pourrait afficher 650 M€ de chiffre d’affaires pour son exercice 2024, avec une marge d’Ebitda de l’ordre de 20 %. L’agence de notation table sur un scénario de base dans lequel la société de TICC dépense autour de 115 M€ par an pour ses croissances externes, lui permettant d’intégrer de 65 M€ à 70 M€ de revenus additionnels. « Lorsque nous sommes entrés au capital, Normec était encore très focalisée sur les Pays-Bas et présente sur deux verticales : la sécurité dans le bâtiment et l’agroalimentaire, rappelle Benjamin Cordonnier. Nous lui avons permis, grâce à des acquisitions stratégiques, de s’étendre dans de nouveaux pays, l’Italie, la France, l’Allemagne, la Suisse, le Royaume-Uni et la Belgique. Mais aussi de s’imposer sur les secteurs porteurs du développement durable et de la santé. Nous allons poursuivre ce développement combinant croissance organique et externe, notamment en ciblant les Etats-Unis, qui est le premier marché mondial mais cependant moins mature que l’Europe. » Cette traversée de l’Atlantique pourrait intervenir dans les 12 prochains mois, avec, a plus long terme, la barre du milliard d’euros de revenus qui est visée.