Adagia grave sa première empreinte en France en jetant son dévolu sur une pépite discrète dans un secteur encore ultra-atomisé : la prothèse dentaire. Le first-time-fund lancé il y a quelques mois par l’ex-PAI Nicolas Holzman, le transfuge de Roland Berger, Charles-Edouard Bouée, et l’ex-patron France de Montagu, Sylvain Berger-Duquene remporte le process confié à Natixis par Motion Equity Partners sur sa participation Minlay, constituée à partir d’un premier LBO sur Protilab en 2017 et renforcée par une stratégie de buy-and-build soutenue ces cinq dernières années. De quoi valoriser le numéro un français de la prothèse dentaire environ 350 M€, soit à peu près 14 fois son Ebitda d’après les informations de CFNEWS. Le premier véhicule d’Adagia, qui affiche 600 M€ sous gestion pour un objectif final de levée de 750 M€ (voir sa fiche ci-dessous), signe ainsi sa deuxième opération après la reprise fin 2021 du fabricant allemand d’équipement laser de chirurgie oculaire Schwind Eye-Tech-Solutions détenu auparavant par Ardian.
Des revenus quintuplés à 85 M€
Cette fois-ci, c’est à Motion Equity Partners qu’il offre une belle sortie, même si le cédant, lui-même en levée de son quatrième véhicule, reste très discret sur ses performances. Il faut dire que le laboratoire de prothèse dentaire, dirigé par un ancien d’HP, Eric Darrou, depuis 2014, a quintuplé son chiffre d’affaires en cinq ans, réalisant environ 85 M€ aujourd’hui, loin devant son concurrent Labocast, filiale du groupe hongkongais Modern Dental Laboratory, qui affichait quelque 16 M€ de revenus en 2020. Sur un marché ultra-atomisé estimé à 1,8 Md€ en France, Minlay a réalisé une vingtaine d’acquisitions permettant la création de 6 pôles régionaux dans l’Hexagone et une première incursion en Allemagne fin 2020.
« Minlay a également contribué à la transformation d’un métier historiquement très manuel avec une digitalisation très poussée grâce à des investissements dans des technologies permettant d’automatiser des tâches fastidieuses et chronophages, améliorant à la fois les conditions de travail des prothésistes et l’empreinte carbone du groupe », résume Alexandre Le Chevallier, investment manager chez Motion Equity. Si le rapport entre le dentiste et son prothésiste reste très personnalisé dans une prestation sur-mesure pour chaque prothèse, l'équipement progressif des cabinets dentaires de scanners remplaçant le moule traditionnel de la prothèse permet des gains de productivité substantiels. L'entrée en vigueur en 2021 de la réforme 100% santé pour un reste à charge nul de l'assuré participe également à la démocratisation de soins autrefois hors-budgets pour les patients défavorisés, mais avec une pression accrue sur les coûts. De quoi pousser les laboratoires de prothèse à se regrouper pour mutualiser les investissements technologiques et le back-office et créer des synergies commerciales, sur le modèle de tant de pans du secteur médical dont le private equity a mené la concentration ces vingt dernières années.
Un boulevard de consolidation en France et en Europe
En passant dans le portefeuille d’Adagia, Minlay se donne donc les moyens d’accélérer cette consolidation inéluctable d’un secteur qui comptait il y a quinze ans quelque 3800 laboratoires, réduits aujourd’hui à 3000, avec un chiffre d’affaires moyen de quelques centaines de K€. « La consolidation est plus avancée en Grande Bretagne mais sur des prestations de moindre qualité. La France est le pays le plus exigeant en Europe en terme de qualités des prothèses et de délais de livraison aux dentistes pour un prix de remboursement moyen plus faible », analyse Sylvain Berger-Duquesne, associé-fondateur d’Adagia, et qui dispose d’un track-record très fourni dans le secteur de la santé lors de sa précédente carrière chez Montagu. Dès lors, l’investisseur mid-cap pan-européen compte dupliquer la stratégie de croissance externe de Minlay dans les pays limitrophes, à commencer par l’Allemagne où le groupe a déjà esquissé une première empreinte.