Ayant changé de dimension dans le giron d'Initiative & Finance, Primelis change d'actionnaire financier. La société de gestion small & mid cap, minoritaire depuis décembre 2018, passe le relais à Sagard dans l'agence de référencement naturel et payant, également éditrice de logiciels. Le fonds canadien, intervenant via le véhicule mid-cap Sagard 4 dont c'est la dixième ligne, devient tout juste majoritaire dans un actionnariat très équilibré aux côtés des fondateurs Philippe El Khechen et Hillel Brodowicz, ce dernier allégeant sensiblement sa participation pour refléter sa prise de recul opérationnelle depuis plusieurs années, et une vingtaine de cadres associés dont Asher Charbit à la tête de la filiale new-yorkaise. Il sort gagnant d'un processus de vente confié à deux banques d'affaires, Amala Partners et eCap, conseil lors du précédent LBO, agissant de concert dans tous les aspects de la transaction.
Plus de 150 M€ de valorisation
« Le marketing digital constitue un des secteurs de la tech dans lesquels nous souhaitons investir et pour lequel nous avions procédé à des travaux de fond en amont du processus de cession », indique Maxime Baudry, associé Sagard MidCap. Le ticket de Sagard, un peu en dessous de ses habitudes, s'accompagne d'une dette unitranche souscrite par Eurazeo Private Debt. Le montage du financement pourrait évoluer vers une senior avec intérêts capitalisés (PIK), et une ligne de capex dédiée à la croissance externe. Le multiple d'Ebitda retenu pour la dette n'est pas encore arrêté, mais le levier sera limité, indique l'investisseur. Selon nos informations, l'entreprise levalloisienne se valoriserait entre 150 et 200 M€.
Modèle Saas
À ses débuts simple agence de conseil en référencement naturel, Primelis a élargi son positionnement à partir de 2017, ajoutant référencement payant et publicité sur réseaux sociaux essentiellement. « Cela nous a permis d'augmenter le panier moyen et d'adresser des clients plus gros », explique Philippe El Khechen. Surtout, l'ex Net Référencement se distingue avec ses logiciels de suivi et d'optimisation, au seul usage de ses consultants initialement mais proposés désormais aux annonceurs avec l'offre de conseil ou séparément. « Nous sommes aujourd'hui une agence outillée ou une plateforme Saas conseillée », résume l'entrepreneur. Ces solutions faciliteraient l'entrée dans certains comptes, amenés le plus souvent à opter ensuite pour un accompagnement par l'agence. En croissance annuelle moyenne de près de 40 % depuis cinq ans, le chiffre d'affaires avoisinait 26 M€ en 2023 et devrait atteindre 35 M€ cette année. À noter qu'il n'y a pas ici de marge brute, car Primelis ne fait pas d'achat média et ne touche donc pas de pourcentage sur le budget publicitaire géré. La marge Ebitda se situerait entre 40 et 50 %.
10 M€ de revenus aux États-Unis
Le positionnement peu commun de l'agence a facilité aussi l'essor outre-Atlantique. « Avec ses outils Saas, ils ont "craqué" de façon organique le marché américain très profond. Cela a merveilleusement bien fonctionné, dans un pays où les paniers moyens sont nettement plus élevés qu'en France », relève Jean-Michel Cagin, associé chez Amala Partners. Les États-Unis contribuent désormais aux revenus à hauteur de 30 %, ou 10 M€, avec une équipe locale comptant pour seulement 20 % de l'effectif de 130 salariés. Même si le lancement outre-Atlantique, envisagé dès 2016 mais effectif en 2020, a connu un retard à l'allumage, « c'est un pari gagnant puisque contrairement à d'autres acteurs européens, Primelis a réussi à chasser des clients locaux et non à accompagner des existants », souligne Numa Bourragué, managing partner d'eCap Partner.
Ouverture au Canada, Mexique et Royaume-Uni
L'univers concurrentiel en France comprend des acteurs soutenus par des fonds, comme Eskimoz, Keyade, Labelium, EDG, Yuri & Neil ou encore Botify, éditeur de logiciels présent aux États-Unis et commençant à faire du conseil. Avec son nouvel actionnaire de référence, l'entreprise aux 350 clients actifs poursuivra son développement, et pourra compter sur l'empreinte nord-américaine de Sagard. Dès cette année et en 2025, elle entend s'attaquer au Canada, au Mexique et au Royaume-Uni, avant de viser l'Allemagne et l'Espagne. La croissance externe est envisagée, après une première expérience concluante en 2020 visant Haskn, agence de production de contenus. « Le M&A est une des composantes de notre thèse d'investissement même si la croissance se fera essentiellement de façon organique. Nous avons déjà identifié avec le management des cibles attractives par leurs expertises complémentaires, leurs outils technologiques différenciés ou la complémentarité géographique », détaille Maxime Baudry. Des discussions ont débuté avec deux cibles en France et à l'étranger.