Industrie pharmaceutique : Aspen / SFI / Proparco / DEG / DFC (Afrique du Sud / États-Unis / France / Allemagne)
Alors que la « troisième vague » de contamination au Covid-19 frappe actuellement l’Afrique, la vaccination reste largement déficiente, en raison de l’insuffisance du nombre de doses disponibles d’une part, et du scepticisme et de la réticence aux vaccins d’autre part. Dans ce contexte, la communauté internationale s’est engagée à renforcer la chaîne d'approvisionnement du continent en matière de vaccins. Parallèlement, en avril dernier, l'Union africaine et son agence de santé publique Africa CDC ont fixé comme objectif ambitieux pour l’Afrique de fabriquer 60 % de ses vaccins de routine d'ici 2040 (contre 1 % environ aujourd’hui). Acteur majeur dans la production de traitements et de vaccins contre le Covid-19 sur le continent, le sud-africain Aspen Pharmacare (Aspen) vient ainsi de bénéficier d’une enveloppe de financement à long terme de 600 M€, grâce à un consortium d’investisseurs internationaux mené par la Société Financière Internationale (SFI ou IFC), la branche secteur privé du Groupe de la Banque mondiale. L’institution financière du développement a octroyé 200 M€, tandis 156 M€ ont été fournis par Proparco, filiale secteur privé de l'Agence Française de Développement (AFD), qui est intervenue dans le cadre de l'initiative de 1,2 Md€ « Covid-19 – santé en commun », lancée en avril 2020 par Emmanuel Macron, en réponse à la crise sanitaire mondiale. 144 M€ ont été arrangés par son homologue allemand DEG, et le solde de 100 M€ a été fourni par l’américain DFC (voir fiche opération sur CFNEWS).
« Ce projet démontre que les biens publics mondiaux nécessitent un financement commun, auquel les banques publiques de développement sont prêtes à contribuer », a déclaré Rémy Rioux, directeur général de l’AFD et président du conseil d'administration de Proparco. Il s’agit du « premier d'une longue série qui aidera à renforcer les capacités locales et à renforcer l'autonomie des régions dans le monde entier, et aidera à lutter immédiatement contre la pandémie actuelle tout en renforçant les futurs efforts de préparation aux pandémies », a ajouté David Marchick, directeur des opérations de la DFC. Le fabricant pharmaceutique sud-africain utilisera cet apport d’argent frais - le plus important jamais réalisé par la SFI dans le domaine de la santé - pour produire cinq cents millions de dose du vaccin Janssen (mis au point par le laboratoire américain Johnson & Johnson) d'ici fin 2022, tout en refinançant sa dette existante et en renforçant son bilan. À plus long terme, cette opération a pour objectif de contribuer à promouvoir la résilience du secteur de la santé. Elle devrait en effet faciliter l’accroissement du savoir-faire en matière de fabrication de vaccins et le partage des connaissances en Afrique. Actif dans plus de cent cinquante États, Aspen emploie environ 9 800 personnes dans une cinquantaine de pays, et exploite vingt-trois usines de fabrication sur quinze sites.
Fonds : Bpifrance / Mubadala (Afrique / France / Émirats arabes unis)
À l’occasion du treizième dialogue stratégique France-Émirats arabes unis (EAU) fin juin, Bpifrance a entrepris de renforcer ses liens avec plusieurs acteurs majeurs de la finance et de l’investissement émirati. Parmi eux, le fonds souverain Mubadala Investment Company (Mubadala), avec lequel la banque publique entretient des rapports de longue date (relire par exemple l'article de 2018 Bpifrance et Mubadala complètent leur accord de co-investissement sur CFNEWS). Conformément aux engagements pris par la France et les EAU lors du dernier Sommet sur le financement des économies africaines du 18 mai, à Paris, en faveur de la relance économique post-Covid en Afrique, les deux partenaires se sont ainsi engagés à déployer jusqu’à 350 M€ sur le continent, dans le cadre d’un nouveau programme de co-investissement dédié au marché du capital-investissement africain. S’appuyant sur l’expertise et le réseau développés par Bpifrance, ils investiront conjointement cet argent en direct dans des entreprises, mais aussi et surtout dans des VC et des fonds de private equity afin de contribuer au financement des start-ups, PME et ETI en forte croissance du continent. Leur cible prioritaire : les fonds régionaux, multi-pays et panafricains dont les équipes de gestion bénéficient d’une expérience reconnue. En Afrique, Bpifrance opère déjà plusieurs programmes à travers son fonds de fonds dédié Averroès Africa, qui a récolté 55 M€ lors de son premier closing en octobre dernier, et qui vise une taille cible de 100 M€. La banque publique française d’investissement a par ailleurs récemment accordé, sur les trois prochaines années, plus de 700 M€ de crédits à l’exportation pour faciliter les achats de produits français par les gouvernements et les entreprises africaines.
Services financiers : Zeepay / I&P / Good Soil VC / ARK Holdings / Absa Bank Ghana / First National Bank Ghana (Ghana / France / Royaume-Uni)
Pour poursuivre son expansion sur le continent et dans les Caraïbes, la fintech ghanéenne Zeepay, active dans une vingtaine de pays africains et disposant également d'un bureau londonien, pourra s’appuyer sur le financement hybride de 6,6 M€ (7,9 M$) récolté lors d’un tour de table de série A d’un montant de 3,9 M€ (4,6 M$) en equity, mené par le fonds d’impact français I&P - avec la participation du britannique Good Soil VC et du family office de la famille fondatrice, ARK Holdings - le solde de 3,3 M€ (3,3 M$) ayant été obtenu sous forme de dette auprès du groupe Absa Bank Ghana, avec le soutien de la First National Bank Ghana. Fondée en 2014 par Andrew Takyi-Appiah (actuel managing director), la société de services financiers mobiles a réalisé un taux de croissance moyen cumulé d’environ 146 % entre 2016 et 2021. Spécialisée dans le paiement d'envois de fonds sur des portefeuilles mobiles dans toute l'Afrique, elle s’est renforcée en avril dernier sur plusieurs marchés africains (notamment le Mozambique, le Malawi, l'Angola et la Namibie) grâce à l’acquisition d’une participation de 51 % dans Mangwee Mobile Money en Zambie.
Fort d’environ 210 M€ (250 M$) d’actifs sous gestion, I&P a réuni 2,5 M€ (3 M$) à lui seul au profit de Zeepay (voir fiche opération de la série A sur CFNEWS). Baafour Otu-Boateng, directeur des investissements au sein du fonds d’impact tricolore, a déclaré : « Zeepay s'est révélé unique par sa capacité à prendre une position de leader dans le monde en pleine expansion des fintechs africaines, tout en assurant la rentabilité. Nous sommes ravis de nous associer à une équipe de direction qui a démontré sa capacité à fournir des produits et services innovants qui transforment les écosystèmes des transferts de fonds et de l'argent mobile. En tant qu'investisseur d'impact, nous sommes impatients de soutenir la remarquable croissance de Zeepay, alors que l'entreprise améliore l'inclusion financière au profit de millions d'utilisateurs à travers l'Afrique. »
Infrastructures énergétiques & EnR : centrale hydroélectrique de Kinguélé Aval / Meridiam / Gabon Power Company / FGIS (Gabon / France)
Au Gabon, le fonds tricolore d’infrastructures Meridiam fait appel à quatre prêteurs pour financer son projet de centrale hydroélectrique Kinguélé Aval, dont il avait remporté le contrat de concession il y a près de deux ans, qui représente un montant total de 179 M€. Contrôlée à 60 % par le fonds créé et dirigé par Thierry Déau, et à 40 % par la Gabon Power Company (GPC) - à travers leur société de projet commune Asonha Énergie - la future centrale, située à cent kilomètres à l'est de Libreville, devrait fournir d’ici fin 2024 une capacité totale de 35 MW. GPC est la filiale du Fonds Gabonais d’Investissements Stratégiques (FGIS), lui-même gestionnaire exclusif du fonds souverain de la République gabonaise. Les deux partenaires ont obtenu une dette d'un montant gardé confidentiel auprès de la Société Financière Internationale (SFI ou IFC), la Banque Africaine de Développement (BAD), la Development Bank of Southern Africa et l'Emerging Africa Infrastructure Fund (EAIF). Il s'agit du troisième projet gabonais de Meridiam, après la Transgabonaise et le port minéralier d’Owendo. (Pour plus de détails, lire l’article Au Gabon, Meridiam s'appuie sur des financeurs locaux pour sa centrale hydroélectrique sur CFNEWS INFRA).
Logistique & Santé : Zipline / Baillie Gifford / Temasek / Katalyst Ventures / Fidelity / Intercorp / Emerging Capital Partners / ReInvest Capital (États-Unis / Royaume-Uni / Singapour / Pérou)
Zipline, une start-up californienne - mais aux racines africaines - de livraison de soins par drone, lève 212 M€ (250 M$), ce qui la valorise 2,3 Md€ (2,75 Md$). Le tour de table de série E a été mené par le britannique Baillie Gifford avec le soutien du singapourien Temasek, des américains Katalyst Ventures, Fidelity, ReInvest Capital et Emerging Capital Partners, ainsi que du péruvien Intercorp. Pour la licorne qui s’est d’abord fait connaître en livrant des fournitures médicales au Rwanda puis au Ghana, cette manière financière servira à développer ses réseaux logistiques au Ghana, au Nigeria et aux États-Unis. Fondée en 2014, elle conçoit et fabrique à la fois les drones, le logiciel de logistique et le système de lancement et d'atterrissage qui les accompagne. Le choix de cette intégration verticale s’explique par la difficulté d’approvisionnement en composants fiables et compatibles, constatée dès ses débuts, alors qu’elle commençait à développer sa technologie. Zipline s’est associée à plusieurs partenaires pour gagner en efficacité, par exemple la société de logistique UPS au Rwanda. C’est en effet sur la construction de son réseau logistique que repose en grande partie son succès croissant au cours des cinq dernières années. La pandémie a eu un impact positif pour l’entreprise dirigée par Keller Rinaudo, dans la mesure où elle a su tirer profit de cette opportunité pour accélérer ses opérations en fournissant non seulement des équipements de protection individuelle, mais aussi des vaccins Covid-19 (elle prévoit de livrer 2,4 millions de doses d'ici la fin de l'année). À long terme, la pépite californienne pourrait s'intéresser à d'autres secteurs, mais elle a pris le parti de se concentrer pour l’instant sur les soins de santé (relire également bulletin #53).
Nouveau fonds : Orange Ventures / Orange (Côte d’Ivoire / France)
En Côte d’Ivoire, l’écosystème des start-ups est aujourd’hui en pleine ébullition, avec de nombreux entrepreneurs à la recherche d’investisseurs pour accompagner leur évolution. Fort de ce constat, la filiale locale du géant des télécommunications Orange a récemment mis en place un véhicule d’investissement technologique dédié aux start-ups et doté d’une capacité d’investissement totale de 350 M€, dont 50 M€ pour la région Afrique et Moyen-Orient, et qui ciblera donc entre autres les jeunes pousses ivoiriennes. Présenté officiellement via son accélérateur Orange Fab la semaine dernière, lors d’une session d’informations, l’Orange Ventures a vocation à accélérer le développement et renforcer les capacités d’expansion des pépites les plus prometteuses, dans les domaines d’expertise d’Orange (réseaux et informatique, entreprise digitale, cybersécurité, fintech) et au-delà (par exemple consumer plateforms, e-gaming, edtech, ou encore santé). Orange Ventures a déjà intégré une première entreprise ivoirienne dans son portefeuille : Moja Ride, une plateforme digitale de paiements principalement dédiée aux opérateurs publics de transport, qui s’était vu octroyer en mars dernier un investissement de Mobility 54, le fonds corporate du constructeur automobile japonais Toyota Tsusho Corporation (TTC) et de la multinationale française CFAO (relire bulletin #131). Le Groupe Orange Côte d’Ivoire englobe en réalité trois filiales, à savoir non seulement Orange Côte d’Ivoire, mais également Orange Burkina Faso et Orange Liberia. Revendiquant vingt-dix millions de clients, il contribue à hauteur de 25 % au chiffre d’affaires du groupe français dans la zone Afrique-Moyen Orient.
Internet & logistique : CloudFret (France / Maroc / États-Unis)
Moins de six mois après son lancement, la société de logistique CloudFret boucle un tour d’amorçage de 372 K€ (440 K$) auprès du véhicule marocain Azur Innovation Fund (dont nous avions évoqué la naissance en 2019 - relire bulletin #39) et de l'accélérateur californien de start-up Plug and Play (voir fiche opération sur CFNEWS). D'abord créée à Casablanca en 2020, et aujourd'hui basée à Marseille via l'incubateur ZeBox de CMA CGM, la start-up propose une plateforme de mise en relation entre expéditeurs / affréteurs et transporteurs de marchandises, visant l’optimisation des tournées à vide des camions de transport routier. Grâce à son système basé sur l’IA connectant les expéditeurs à un réseau étendu et fiable de transporteurs d’Europe et d'Afrique, elle se présente comme la première solution qui lie les deux rives de la Méditerranée. « Grâce à un algorithme d'IA, nous pouvons prévoir les retours à vide des transporteurs partenaires de la plateforme et donc les faire correspondre à des appels d'offres de chargeurs », a expliqué son fondateur et P-dg, Driss Jabar, dans une déclaration au magazine Supply Chain. Comptant déjà une trentaine de clients chargeurs et une cinquantaine de partenaires transporteurs, CloudFret couvre aujourd'hui sept pays (Maroc, France, Espagne, Portugal, Allemagne, Pays-Bas et Belgique), et compte étendre ses services à dix autres dans les six prochains mois. En ligne de mire : la Tunisie, la Mauritanie, le Sénégal, la Suisse et plusieurs pays d'Europe de l'Est. La levée de fonds lui permettra en outre de doubler ses effectifs. Étant donné les millions de camions transitant chaque année entre les deux rives de la Méditerranée, la jeune pousse semble promise à un bel avenir.
Nomination - Conseil : Deloitte (France / Afrique francophone)
Pascale Ponroy a été nommée directrice marketing & communication de Deloitte France et Afrique francophone le mois dernier. Ayant rejoint le groupe en 2001, au sein de Taj, elle était devenue directrice de la communication de l'entité Deloitte France et Afrique francophone en janvier 2019. Désormais en charge d'un périmètre élargi (couvrant la communication institutionnelle, interne et externe, les relations presse, les relations publiques, et le marketing), elle sera désormais rattachée au département C&I (Clients et Industrie), piloté par Eric Meistermann, associé et membre du comité exécutif. Cette promotion s'inscrit dans le cadre de la mise en place du regroupement des équipes communication et marketing de Deloitte sous l’impulsion du nouveau dirigeant, nommé en juin dernier, Gianmarco Monsellato.
Et aussi...
- Le fonds tricolore Meridiam devrait bientôt faire officiellement son entrée au capital de la Setrag, l'entreprise de transport ferroviaire exploitant le réseau de chemin de fer gabonais, détenue par la COmpagnie MInière de L'OGooué (COMILOG, elle-même filiale du groupe métallurgique français Eramet).
- Soutenu par Proparco et la Société Générale, le groupe immobilier français Duval va réaliser un complexe de 60 M€ pour le diocèse d’Abidjan, qui comprendra une résidence hôtelière de la marque de location saisonnière et de vacances Odalys (filiale de Duval) comptant 130 chambres, d’un supermarché, de bureaux et de restaurants.
- L’assureur tricolore Axa regroupe ses activités en Asie et en Afrique au sein d’une entité nommée Axa Asia & Africa, afin de mieux exploiter ces marchés en croissance rapide. Il mettra particulièrement l’accent sur la santé, comme en témoigne l’ouverture récente d’Axa OneHealth et de ses seize cliniques à travers l’Égypte.
- Le consortium AIIM, Adenia et IFC a pris une participation majoritaire dans Eastcastle, spécialiste dans la gestion des tours de télécommunications en Afrique, en contrepartie de 110 M€ (130 M$). La cible fondée en 2020 utilisera ces ressources pour développer de nouvelles tours, dans un premier en RDC, au Nigeria et en Côte d'Ivoire.
- Le sud-africain MultiChoice débourse 238 M€ (282 M$) pour accroître de 20 à 49 % ses parts dans la société nigériane de paris sportifs et de divertissement BetKing.
- Veolia renforce sa position sur le marché sud-africain grâce au contrat de 3 M€ qu’il vient de décrocher concernant la gestion des déchets dangereux de la raffinerie d’Engen.
- Après le lancement de programmes en Afrique de l’Ouest en mai dernier, l’école lilloise d’ingénieurs des transitions Junia se renforce en Afrique du Nord en s’alliant avec KMR, leader marocain de l’enseignement privé. À cette occasion, sa filiale rabataise, Yncréa Maroc, devient Junia Maroc.
- L’expert français de la gestion de flottes véhicules Océan, contrôlé depuis 2015 par Orange Business Services (lire l'article Ocean prend le large sur CFNEWS), s’allie avec AlertGasoil, spécialiste marseillais de la mesure de la consommation de carburant et des émissions de CO2, pour proposer sur le marché africain des solutions visant à lutter contre le vol de carburant dont sont tout particulièrement victimes les poids lourds.
- Présent à Casablanca depuis quatre décennies, le groupe de transport et logistique français Geodis s'est implanté le 1er mai dernier à Tanger, puis le 1er juillet à Mohammedia, au nord de Casablanca. Avec l'ouverture de ces nouveaux entrepôts, il possède désormais dans le pays 50 000 m² de surfaces d’entreposage et compte trois cents collaborateurs.
Bonne fin de semaine et au mardi 20 juillet !
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