Nicolas Bouët et Laurent Dray, BFR Expertise & Solutions
La distribution massive de Prêt Garanti par l’État (PGE), mesure mise en place au début de la crise sanitaire, a été sans nulle doute l’une des mesures phares du programme gouvernemental de soutien à l’économie. Largement distribué, il a rencontré un énorme succès. En effet, selon les chiffres communiqués début 2021 par le Ministère des Finances, plus de 638.000 entreprises ont souscrit un PGE pour un total de 130 milliards d’euros. Alors que le gouvernement avait imaginé ce dispositif pour aider les entreprises à faire face à leurs dépenses courantes, il s’avère que le PGE a surtout été utilisé par les entreprises pour se constituer une épargne de précaution. Cela a permis de maintenir à flot la trésorerie des entreprises et d’éviter une hécatombe de faillites, même si l’on pointe ici ou là des difficultés pour certains pans de l’économie et une hausse des retards de paiement. Mais, cette hausse massive de l’endettement des entreprises a vu ressurgir le thème du surendettement structurel dont souffrent les entreprises françaises. La Banque de France, dans son bulletin mensuel, s’alarmait dès 2018 de la hausse de leur endettement, hausse plus rapide que l’amélioration de leur capacité d’autofinancement, ce qui, à terme, était de nature à les fragiliser. Mi-2019, l’endettement des entreprises pesait 73,5% du PIB, contre 58% 10 ans plus tôt. Or, la distribution massive des PGE a encore accentué cette tendance et le niveau d’endettement des entreprises françaises flirte désormais avec les 2000 milliards d’euros ! Si un tel niveau d’endettement ne semble pas avoir pour le moment de répercussions sur leur day-to-day, les entreprises étant « préservées » par un niveau de trésorerie élevée, il est à craindre que ce sujet devienne brûlant d’actualité dès la publication des bilans 2020 qui verra une baisse d’activité et une très probable chute de leur rentabilité ce qui pèsera sur leurs fonds propres. Conscient de ces risques, le gouvernement a réfléchi dès septembre 2020 à une série de dispositifs de nature à permettre aux entreprises de renforcer leurs capitaux propres afin d’être mieux armées lors de la reprise d’activité. Courant octobre 2020, le Ministre des Finances, Bruno Le Maire, a annoncé la mise en place d’une enveloppe de 20 milliards d’euros consacrée au renforcement des fonds propres sous forme de prêts participatifs. Plus récemment, une mesure plus technique prévue dans le projet de loi de finance 2021 permet aux PME de neutraliser fiscalement la réévaluation de leurs actifs.
L’affacturage, première source de financement des entreprises
Néanmoins aux côtés de ces dispositifs exogènes, il existe un outil que les entreprises peuvent actionner sans alourdir leur endettement : l’affacturage déconsolidant. Parce qu’il s’appuie sur une ressource stable et pérenne qui représente en moyenne 2 mois de chiffre d’affaires, l’affacturage est un outil de financement puissant qui permet de dégager un niveau de cash considérable dont les entreprises ont largement su tirer profit. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si, porté par la simplicité de sa mise en place et la concurrence que se livrent les factors, l’affacturage est devenu ces dernières années la première source de financement court terme des entreprises leur offrant des conditions de financement très attractives. Mais la force de l’affacturage réside aussi dans les bénéfices comptables que l’on peut en tirer. En effet, le factoring est par nature déconsolidant en normes French Gaap. En normes IFRS, les conditions de la décomptabilisation des encours sont plus strictes car il s’agit de transférer au factor la quasi-totalité des risques et avantages liés aux créances clients afin de pouvoir les sortir du bilan. A ce stade, il semble important de rappeler que compte tenu de l’impact sur la sincérité des comptes, seul le Commissaire aux comptes de l’entreprise est habilité à valider l’aspect déconsolidant d’un programme. Ce qui renforce et sécurise le dispositif. Par la décomptabilisation de son encours clients, l’entreprise améliore son BFR par la diminution de son DSO, diminue son endettement net et bonifie ses ratios bilanciels par la sortie de son poste clients substitué par des disponibilités. En outre, un tel programme permet à une entreprise de puiser dans ses ressources pour dégager un complément de trésorerie qu’elle pourra utiliser pour financer une acquisition dans le cadre d’une opération de croissance externe par exemple. Et cela sans augmenter son endettement, ni avoir recours à un montage financier qui diluerait les actionnaires. C’est cet aspect vertueux qui explique que cette mécanique est de plus en plus utilisée et qu’un grand nombre d’entreprises cotées au SBF 120 ont recours à ce type d’opérations que ce soit dans le cadre de programmes récurrents ou lors d’opérations « spots ».
Un véritable appétit des factors pour la déconsolidation
Du côté des sociétés d’affacturage, ces montages sont perçus comme un relais de croissance alors qu’elles ont enregistré depuis le début de la crise sanitaire une baisse importante des encours qui leurs sont confiés et donc une baisse de leur PNB. Il y a donc du côté des factors un véritable appétit pour ce type de montage quand bien même ceux-ci seraient réputés plus risqués. En effet, dans les programmes déconsolidants, l’entreprise transfère au factor tous les risques et avantages liés à ses créances, ce qui interdit au factor tous recours envers le cédant. Le Factor doit donc entre autres :
- Neutraliser le risque de défaillance des clients par le recours à une assurance-crédit qui devra être ciselée et adaptée aux particularités de l’entreprise,
- Se prémunir contre les risques de dilutions (non-paiement de tout ou partie des factures du fait d’avoirs, de risques de compensation, de litiges, de marges arrières, etc…),
- Anticiper tout risque de retard de paiement dans le calcul des intérêts
Parce qu’il faut souvent concilier des intérêts contradictoires et décortiquer tous les aspects techniques et de risque pour choisir le bon programme, la bonne architecture et le bon acteur, le recours à un cabinet de courtage spécialisé peut se révéler précieux. Outre la consultation de l’ensemble des acteurs du marché ce qui permet d’optimiser le niveau de financement et de réduire les conditions tarifaires, il offre une grille de lecture pour décrypter tous les aspects du programme (juridique, organisationnel, informatique, etc…) et permet ainsi de s’assurer que la solution retenue est la mieux adaptée aux caractéristiques et aux besoins de l’entreprise. Cela permet également aux dirigeants, et c’est loin d’être neutre, de transférer vers un tiers la pression que les banquiers peuvent parfois exercer.