Les acteurs du non coté ont investi près de 15 Md€ dans 2 200 entreprises et ont réuni 18,7 Md€, dont 48 % auprès de LPs étrangers, d'après les données de France Invest et Grant Thornton. La part des investissements réalisés dans des sociétés européennes a doublé depuis 2017 à 3,1 Md€. Plus de 1 500 sociétés ont été cédées.
Les indicateurs du capital-investissement tricolore restent au vert, en témoignent les résultats de la 30ème édition du rapport annuel d'activité publié par France Invest et Grant Thornton. Pour 2018, cette étude à laquelle 94 % des 315 membres actifs de l'association tricolore ont répondu, a mis en lumière une nouvelle année de croissance des capitaux levés, montants investis et désinvestissements. Alors que les levées de nouveaux véhicules avaient déjà enregistré une forte progression en 2017 à 16,5 Md€ (lire ci-dessous), elles ont, en effet, franchi un nouveau record l'an passé pour atteindre pas moins de 18,7 Md€. « C'est plus de 50 % de plus qu'en 2005, année au cours de laquelle les levées de capitaux avaient, pour rappel, connu une augmentation massive à 12 Md€ », souligne Dominique Gaillard, président de France Invest.
Renforcement des caisses de retraite dans les levées
Et d'après les données de l'étude, la France serait très clairement redevenue attractive pour les investisseurs étrangers. « En 2018, 48 % des capitaux ont été levés à l'international, contre 39 % en moyenne entre 2008 et 2017, insiste Dominique Gaillard. L'an passé, des investisseurs venus de nouveaux pays, comme la Corée, le Japon, le Chili ou la Colombie, ont même participé aux fundraising de fonds français. » L'année 2018 a, par ailleurs, été marquée par un renforcement massif des caisses de retraite dans les levées de fonds. Alors que leur contribution avait diminué en 2017, essentiellement en raison des contraintes réglementaires visant l'allocation d'actifs dans le non-coté, elle a, en effet, augmenté de 83 % l'an passé à 2,9 Md€. Sur la période, l'allocation des fonds souverains a également beaucoup progressé (+32 %) pour atteindre 1,3 Md€, soit 7 % des montants totaux levés.
Baisse des souscriptions des banques liée à Bâle III
De leur côté, si les compagnies d'assurance et les mutuelles restent les deuxièmes plus gros contributeurs des levées de fonds avec 3,03 Md€ investis - juste derrière les fonds de fonds qui dominent le classement avec 4,2 Md€ investis -, elles ont néanmoins diminué leur allocation de 8 % en 2018. « La récente baisse des ratios de Solvency II concernant les assureurs, qui prévoit un passage du taux de chargement de 39 % à 22 %, devrait permettre d'inverser la tendance », anticipe Dominique Gaillard. Pour finir, les banques et les industriels ont, eux aussi, diminué leurs souscriptions dans les fonds français de 30 % et 31 %, avec des contributions respectives dans les levées de 1,1 Md€ et 704 M€. « Nous pensons que la baisse des investissements des banques traduit une tendance de fond liée à Bâle III et aux effets attendus de Bâle IV », explique le patron de France Invest. Côté segments, l'étude démontre une augmentation de 26 % des levées de fonds de capital-développement (fonds de growth compris) et de 9 % des levées de fonds de capital-transmission. Ainsi, sur les 18,7 Md€ levés, environ 6 Md€ concernent des fonds de cap-dev et près de 10 Md€ des fonds de capital-transmission.
63 % des investissements réalisés dans des PME
L'an passé, 14,7 Md€ ont, par ailleurs, été investis dans 2 218 entreprises, contre 14,3 Md€ en 2017, sachant que les tickets inférieurs à 5 M€ représentent près de 80 % des investissements en nombre et 14 % des montants injectés. « C'est la sixième année consécutive de progression des montants investis, insiste Olivier Golder, administrateur de France Invest. Sur la période, le nombre d'entreprises accompagnées a également augmenté et pas uniquement pour les grandes entreprises puisque 63 % des investissements ont concerné des PME et 20 % des ETI. Beaucoup de petites sociétés en création ont aussi été accompagnées en 2018, marquant un niveau record d'investissement dans l'innovation. » D'un point de vue sectoriel, l'industrie, les biens de consommation et le médical/biotech ont concentré l'essentiel des investissements en montants (sachant que l'informatique et les services financiers ont également connu une forte progression). Pour autant, en nombre d'entreprises accompagnées, c'est le secteur informatique & numérique qui domine clairement le classement.
Nette augmentation des investissements à l'international
« Cette nouvelle édition de l'étude fait également ressortir une nette augmentation des investissements à l'international, remarque Olivier Golder. En effet, même si 75 % des 14,7 Md€ investis l'ont été en France, la part des investissements réalisés dans des sociétés européennes a doublé depuis 2017 à 3,1 Md€. » Côté investisseurs, l'année 2018 a, par ailleurs, été marquée par une forte baisse des business angels, aussi bien en nombre d'opérations qu'en montants. « Beaucoup d'entre eux interviennent au travers de fonds fiscaux (FIP et FCPI) - leur collecte a, pour mémoire, baissé de 67 % en 2018 en raison de la suppression de l'ISF -, et l'incertitude liée au prélèvement à la source pour ceux investissant via des structures IR n'a pas aidé », explique Dominique Gaillard. Et de poursuivre : « Avec l'arrêt de l'ISF, 434 M€ n'ont pas été investis dans les entreprises, néanmoins cette baisse a été contrebalancée par l'augmentation des investissements dans l'économie réelle sans l'avantage fiscal. »
Croissance du nombre d'entreprises désinvesties
Pour finir, 1 532 entreprises ont été partiellement ou totalement cédées en 2018, contre 1 508 en 2017, pour un montant total de 9,8 Md€ (au coût historique). L'année écoulée a ainsi marqué la sixième année consécutive de croissance du nombre d'entreprises désinvesties. Et tous les segments de marché ont été concernés. Du point de vue des acheteurs, les industriels et les sociétés de capital-investissement restent en tête en montants désinvestis au coût historique, devant le management, les institutions financières ou encore les IPO. « 2018 aura été une bonne année pour le capital-investissement français, conclut Dominique Gaillard. Sauf événement macro-économique majeur, 2019 devrait suivre la tendance car cette classe d'actifs intéresse de plus en plus d'acteurs, y compris hors de France. » D'autant que France Invest ne capte pas encore dans ses chiffres tous les investisseurs intervenant en France, comme les fonds de pension canadiens ou certains family offices et fonds corporate. « Nous y travaillons », assure Dominique Gaillard, qui indique que l'objectif fixé par son prédécesseur, à savoir atteindre les 20 Md€ levés par an en 2020, reste plus que jamais d'actualité.
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