Le dernier des Mohicans des groupes vétérinaires indépendants a fini par céder aux sirènes du private equity. Alors que son concurrent Sevetys est passé sous le contrôle d’Eurazeo l’été dernier, qu’Univet a troqué Platina pour Infravia et que VetOne a été racheté par IVC Evidensia en octobre 2021, Mon Véto a longtemps résisté à l’appel de l’actionnariat financier. Un an après avoir structuré un financement unitranche de 105 M€ auprès de Barings, le groupe créé en 2010, et jusque-là détenu exclusivement par son fondateur David Beciani, deux dirigeants et 26 vétérinaires, a fini par ouvrir son tour de table à Ardian qui lui apporte 100 M€ de fonds propres en pur cash-in pour détenir près de 20% du capital, selon nos informations.
De l'intérêt chez les fonds sponsorless
« L’accélération du rythme de croissance externe a rendu nécessaire le renforcement des fonds propres de Mon Veto, mais contrairement aux autres opérations du secteur, les dirigeants ont opté pour une augmentation de capital sans aucun cash-out », souligne Arnaud Petit, président d’Edmond de Rothschild Corporate Finance, conseil des dirigeants dans ce process qui a attiré essentiellement des fonds sponsorless, le ticket étant trop petit pour les fonds infra et le cahier des charges excluant les acteurs du majoritaire. Ardian, qui connaît bien le secteur et était déjà candidat au rachat de Sevetys il y a un an (qu’il accompagne par ailleurs en dette privée), avait approché les dirigeants en amont du process et les a convaincus grâce à son expertise dans la consolidation des secteurs analogues comme Inovie dans les labos de biologie et Simago en radiologie.
Plus de 500 M€ de valorisation
L’investisseur de la place Vendôme signe à cette occasion la 16ème et dernière ligne de son véhicule mid-cap Ardian Expansion V qui a réuni 2 Md€ en 2020. La structure de la dette n’a pas été modifiée dans cette opération, Barings s’engageant à apporter de nouvelles lignes d’unitranche jusqu’à 400 M€, dans la limite d’un ratio d’endettement « raisonnable », vraisemblablement autour de 5 fois l’Ebitda qui était le ratio d’il y a un an. Si la valorisation est confidentielle, on peut supposer qu’elle est bien au-dessus de 500 M€ si l’on considère que le multiple d’Ebitda pour ce type de plateforme est supérieur à 15 et que la marge d’Ebitda moyenne du secteur est de 20%, ce qui situerait l’Ebitda de Mon Veto autour de 36 M€ pour les 180 M€ de chiffre d’affaires affichés en 2022.
Une croissance de 80 %
Fondé en 2010 et basé à Rouen, Mon Véto s'est rapidement hissé au rang de numéro deux du secteur derrière IVC-Evidensia. Sa stratégie de buy-and-build s’est particulièrement accélérée ces dernières années, totalisant 168 acquisitions en cinq ans, dont 80 ces douze derniers mois. Son chiffre d’affaires a également quasi-doublé sur la période (+ 80 %), grâce à l’annexion de cliniques régionales, dans un mouvement de consolidation global qui a fait passer les entités détenues par un groupe de 2 % en 2019 à près de 20 % fin 2022 selon une étude récente sur le secteur. « La stratégie de Mon Véto se concentre sur la création de grappes locales favorisant les synergies entre cliniques vétérinaires au sein d'un même territoire », précise Alexis Lavaillote, managing director chez Ardian Expansion. Le groupe totalise ainsi aujourd’hui 231 cliniques implantées dans toutes les régions françaises et en Belgique, employant près de 1 200 personnes, dont plus de 550 vétérinaires.
Un marché en surchauffe
Il faut dire que le temps presse face à l’offensive accrue des acteurs anglo-saxons qui rachètent des cliniques à tour de bras ces derniers mois. Outre IVC-Evidensia et Anicura qui sont arrivés sur le marché français en 2018, la participation de BC Partners VetPartners (480 cliniques au UK et 5 en Italie) affiche ses ambitions de conquête en France, tandis que de petits acteurs locaux comme Argos Vétérinaires, soutenu par GSquare Capital, veulent également monter en puissance. Sur un marché qui connaît une surchauffe des valorisations, Mon Veto revendique une différenciation par rapport aux autres « prédateurs » du secteur. « Le modèle de développement de Mon Veto accorde une place essentielle aux vétérinaires et a prouvé sa capacité d’intégration en développant les moyens mis à disposition des praticiens (locaux, matériels, formations…), afin de leur permettre d’exercer leur métier et leur passion pour les animaux dans les meilleures conditions », assure Arthur de Salins, directeur chez Ardian Expansion, qui voudrait également accompagner Mon Veto dans son expansion hors des frontières tricolores, et notamment en Italie et Espagne où le marché est encore très fragmenté.