Ces dernières années, on le sait, furent marquées par une liquidité excessive sur les marchés fournissant des ratios de dette pour les LBO allant jusqu’à plus de 9 fois l’Ebitda; le tout accompagné de CDO, CLO et d'un foisonnement d’instruments financiers risqués. Le retour de médaille l'été dernier entrainé par la crise des subprimes a totalement changé la donne. Presque 9 mois plus tard, où en est le marché? « Nous sommes aujourd’hui sortis du tunnel, mais nous avons encore beaucoup de leçons à en tirer », a indiqué Michaël Calvert-Smith, chief operating officer au département corporate & investment banking de la Société Générale, lors de la matinée-débat sur les financements structurés organisée par le fournisseur de solutions logicielles CSC.
Des normes pour les prêteurs
L’opacité du marché du crédit et les nouvelles dispositions de Bâle II ont conduit les banques à s’interroger sur leur organisation notamment sur l’optimisation de leurs flux. Le Loan Market Association (LMA), l’association européenne pour le marché des prêts syndiqués, préconise plusieurs orientations comme la standardisation des normes utilisées par la profession, une automatisation des process ou une meilleure communication entre les acteurs. « Un groupe de travail mené par le LMA, BNP Paribas, Natixis et la Société Générale réfléchit à la concrétisation de ces différentes propositions et envisage le lancement d’une plate-forme d’échange », fait remarquer David Abitdol, global head of structured finance operation de la Société Générale , lors de la conférence CSC.
Alors que le marché a longtemps été plus favorable aux emprunteurs, désormais le rapport de force s’est inversé avec un fort problème de liquidités interbancaires. Le risque systémique, véritable préoccupation pour les banques, oblige les banquiers à ressérer leurs conditions de prêts en augmentant les délais. Ils transfèrent aussi moins leur portefeuille et réduisent la complexité des opérations. La crise des subprimes a également modifié la pratique des prêteurs. « Le problème de liquidité du marché impose aux banques une sélectivité très importante sur les opérations à financer », commente Stéphane Monnier, Head of Leveraged Finance de KBC ( photo et écouter l' interview ci-dessous).
Des levées de dette LBO retombées au niveau de 2003
Alors que les prêts syndiqués ont été multiplié par trois durant les cinq dernières années, le stock de LBO à syndiquer demeure important aujourd’hui. Selon les informations datant du premier trimestre 2008 du Loan Connector, certaines deals 2007 comme Alliance Boots, Debitel, Kauffman & Broad ou Camaieu n’ont toujours pas revendu leurs excès de dette. Pour 2008, le marché primaire est freiné tout comme le marché secondaire qui s’essouffle du fait de la baisse d’appétence pour les investissements primaires. « Les levées de dette LBO sont retombées au niveau de 2003 et 2004 », indique François Vidal, associé directeur associé chez Close Brothers, lors de la dernière conférence organisée par la banque d’affaires sur la restructuration de la dette (voir graphique). Outre la baisse en volume des opérations et la disparition des « jumbo » deals, les conditions de remboursement se trouvent aussi affectées.
Au sommet du marché, la structure de dette était très agressive avec des tranches d’amortissement réduites au profit de bullet ou de crédit revolving. "Aujourd’hui les banquiers sont revenus aux fondamentaux avec des taux d’intérêt plus élevés et un renforcement de leurs garanties
", rajoute Stéphane Monnier.
Les banques continuent néanmois à prêter mais dans certains cas bien précis. Certains LBO mid cap, bien connus des prêteurs et "surs" tirent leur épingle du jeu depuis le début de l’année si toutefois un clu deal peut s'organiser. A titre d'exemple, les LBO bis repassés sans encombre s'appellent Maisons du Monde ou encore Averys récemment. Dasn des LBO primaires, on peut citer Atrium, Frial.. Pour Princess Yachts repris pour 250 M€ par L Capital la semaine passée, on peut noter toutefois que la banque prêteuse, Calyon, a des liens étroits avec LVMH, le sponsor de L Capital...En tout cas, rien au delà de 500 M€ de valorisation...
Les acteurs du retournement affutent leurs armes
Si on ne peut encore affirmer que certaines entreprises sous LBO souffrent depuis d’une dégradation de leurs finances - aucune restructuration sévère n'étant encore annoncée d'après Close Brothers, ce type d’opérations pourrait se multiplier à moyen terme, d’où l’arrivée de nombreux fonds de retournement. En France, cette pratique est déjà la spécialité de fonds comme Caravelle, Walter Butler, Développement & Partenariat. Un nouveau venu depuis peu, Vermeer Capital vient de lever 75 M€ pour son premier fonds (lire l’article ci-dessous). Et les anglo-saxons sont déjà bien présents opérant de Londres souvent mais d'aucuns ont ouvert des bureaux à Paris à l'instar de HIG, depuis 2007 et comptant déjà 4 professionnels dans la capitale dont Olivier Boyadjan recruté en février 2008 de la CDC et ancien de HBOS.
Les sociétés de conseils ne sont pas en reste et aménagent ou musclent leur activité de restructuring. C’est le cas de Duff & Phelps qui vient notamment de lancer cette pratique en France, 18 mois après son emménagement à Paris (lire ci-dessous). Les avocats recrutent également dans cette pratique comme Bird & Bird, Brunswick (lire ci-dessous) ou encore Sarrau Thomas Coudert.
Interview audio Stéphane Monnier de KBC
Retournement : Vermeer Capital réunit 75 M€ pour son 1er fonds
Duff&Phelps crée une practice restructuring à Paris