Alcool, mère de tous les vices. Ma mère m’avait prévenu. Mais je ne savais pas que l’amour du vin m’entrainerait un jour dans l’aventure des paris hippiques.
Il y a deux ans j’accompagnais mon amie à un diner de gala la veille du Prix d’Amérique. Black-tie et robes de soirée, dans les locaux tout justes inaugurés du Pavillon Cambon, superbe salle installée dans les anciens locaux du crédit Foncier. La gigantesque salle de réception construite par l’architecte Charles Mewes à la fin du 19ème siècle peut accueillir un millier de convives à diner.
Nous étions installés à la table du président de la société du Cheval Français Dominique de Bellaigue. Conversation agréable, dîner préparé par Potel et Chabot qui gère le lieu. J’admirais distraitement le ballet ininterrompu des serveurs qui s’affairent autour des nombreuses tables. Mon attention s’est fixée davantage lorsque vers la fin du repas, je les vu s’approcher avec des bouteilles de Dom Pérignon.
Même chez les convives les plus blasés, ce champagne de légende retient l’attention. Avec cette bouteille si particulière, sombre, avec son étiquette jaune pâle qui joue le ton sur ton, impossible de voir quel millésime nous était servi. Un petit coup d’œil précis au menu, pour découvrir notre chance : c’était un 1999, millésime connu pour ses arômes extravagants. Il y a le champagne et il y a le Dom Perigon. Avec peut être une exception pour son cousin, le blanc de blanc Dom Ruinart.
Dans la coupe, le Dom Perignon se distinguait par sa couleur solaire presque ambrée. En bouche, ses bulles d’une finesse absolue, n’étaient là que pour souligner la noblesse du cépage chardonnay. Ce dernier emplissait le palais de ses notes particulières de fruits secs, d’ amandes effilées. Sa finale était légèrement fumée. J’aime les champagnes qui se rapprochent davantage d’un vin tranquille. J’aime lorsqu’ils ne conservent qu’une faible acidité pour souligner leur grand âge. Généralement, dans un diner de gala, le dessert est signe de départ. Trop de sucre ne saurait convenir à certaines personnes délicates. Ce soir là, le Dom Pérignon jouait un effet contraire et rapprochait plus encore les personnes autour de la table.
Mon amie se pencha vers le président du Cheval Français pour lui demander quel trotteur gagnerait le lendemain. Plutôt une formule de politesse qu’une véritable question de connaisseur. Ni elle, ni moi n’avions jamais joué aux courses. Le président du cheval français répondit gentiment qu’il conseillait de miser sur le numéro 15. Nous prîmes congé.
Le lendemain, je poussais la porte du bar PMU de la rue du Commerce. J’ai tout de suite adoré le contraste. Dom Pérignon et tenue de soirée la veille, bière et chemise ouverte, le lendemain. Mais une même passion pour le Prix d’Amérique. J’ai misé sur Maulnes du Corta et il a remporté le prix au terme d’une magnifique course. Depuis, je ne rate plus aucun prix d’Amérique. En 2010, Oyonnax m’a privé de tous mes gains potentiels. Mais la semaine dernière Ready Cash a pris sa revanche, et moi avec.
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