Automobile : Renault / DRAC (France / Chine)
Longtemps considéré comme un Eldorado, le marché automobile chinois, représentant une fois et demie le marché nord-américain, apparaît maintenant comme une source de difficultés pour constructeurs français comme Renault et Group PSA. En suivant le pas de son homologue PSA, qui a cédé sa JV pour la marque DS l'an dernier, la marque au losange renouvelle sa stratégie en Chine en recentrant ses activités sur le véhicule utilitaire et le véhicule électrique. Il va arrêter une partie de ses frais dans l’empire du milieu, en vendant ses parts de la JV Dongfeng Renault Automotive Company (DRAC), dédiée aux véhicules particuliers thermiques. Il transfèrera sa participation dans cette JV, à son partenaire local Dongfeng Motor, la coentreprise cessant les activités liées à la marque Renault. La JV DRAC, l’un des héritages de Carlos Ghosn, avait été inaugurée en février 2016, représentant un investissement initial de 870 M€ pour une capacité de production de 150 000 voitures. Alors qu’au premier trimestre de cette année, DRAC n’a construit que 14 véhicules et n’a vendu que 633, selon les chiffres cités par le FT.
Après la cession de DRAC, le constructeur coté s’appuie sur trois JV locales pour assurer sa présence en Chine dans deux secteurs clés. Sur le véhicule utilitaire léger, dont le marché en rapide évolution a atteint 3,3 millions de véhicules vendus en 2019 et devrait continuer à croître progressivement, Renault dispose avec Brilliance Jinbei de la JV Renault Brilliance Jinbei Automotive (RBJAC), lancé en décembre 2017. Sur le véhicule électrique, dont le marché chinois est de loin le plus grand marché au monde avec 860 000 véhicules électriques vendus en 2019 et le pourcentage du marché devrait atteindre 25 % de l’ensemble du marché chinois d'ici à 2023, Renault prévoit de renforcer son partenariat avec Nissan et Dongfeng au sein de la coentreprise eGT pour promouvoir son modèle électrique phare K-ZE (photo ci-dessus). Dans ce secteur, il dispose d’ailleurs de JMEV, créée en 2015, en partenariat avec le chinois JMCG (Jiangling Motors Corporation Group). JMEV a pour ambition de capter 45 % du marché chinois des véhicules électriques en 2022 avec quatre modèles principaux (lire aussi notre chronique précédent).
La décision de cession de son activité chinoise intervient après la crise sanitaire du covid-19 et l'année fiscale 2019 qui a vu les bénéfices de Renault en chute (volumes de ventes du en baisse de - 3,4 % et chiffre d’affaires - 3,3 % pour 55,5 Md€), le constructeur automobile cherchant à réduire ses coûts de 2 Md€. Son cours s’affiche aujourd’hui environ 16 €, contre 41,9 € au début de l’année. Plus récemment, les agences de notation Standard & Poor's et Fitch Ratings ont abaissé la note de la dette de Renault à BB+ avec une perspective négative.
Énergie : Total / Adani (France / Inde)
Après le partenariat annoncé en octobre dernier dans le secteur gazier en Inde (lire aussi notre chronique précédente), le pétrolier coté Total étend son partenariat dans le solaire avec le Groupe Adani, conglomérat basé à Ahmedabad et actif dans la production d'électricité et les terminaux portuaires, la logistique, l'agribusiness. Total et Adani Green Energy Limited (AGEL), coté à Mumbai et filiale à 74,92 % du groupe Adani, vont créer une JV à parts égales, dans laquelle AGEL apportera ses actifs solaires en opération et Total injecte 500 M$. Réparties sur 11 états indiens, les centrales ont une capacité cumulée de plus de 2,148 gigawatts, incluant notamment les projets nommés Restricted Groupe 1 et 2, et bénéficie de contrats d’achat d’électricité de près de 25 ans avec des distributeurs d’électricité nationaux et régionaux, avec un tarif garanti. L’opération fait partie du projet ambitieux du groupe Total du déploiement de 25 gigawatts de capacité de production d’énergies renouvelables d’ici à 2025. Le gouvernement Indien mène actuellement une politique volontariste en matière de croissance des énergies renouvelables : la capacité en Inde, pays clé pour la lutte contre le changement climatique, devrait ainsi passer de 81 gigawatts en 2019 à 225 à l’horizon 2022.
Pour cette opération, Allen & Overy et AZB Partners ont conseillé Total. Adani Group s’est appuyé sur l’expertise de Cyril Amarchand Mangaldas en Inde.
Internet : Sony / Bilibili (Japon / Chine)
Le conglomérat japonais Sony Corporation a investi 400 M$ dans la plateforme chinoise de streaming vidéo Bilibili, coté au Nasdaq. L’opération s’est réalisée via une souscription de 17 310 696 actions ordinaires de catégorie Z nouvellement émises de Bilibili par Sony Corporation of America (SCA), filiale américaine de Sony. Le prix est fixé à 23,1071$ par action ordinaire de classe Z, équivalant à 23,1071$ par action de dépositaire américain (ADS). L’opération a d’ores et déjà été finalisée le 10 avril dernier, permettant à Sony de détenir 4,98 % du capital de la plateforme chinoise. Fondée en 2009 par l’entrepreneur Yi Xu, la cible, mélangeant les styles de ses homologues américains comme Netflix, Youtube et Twitch, a surtout un grand succès auprès de la jeune génération chinoise, dite génération Z (nés entre 1990 et 2009). Dotée des offres comme les eSports, les clips musicaux et les documentaires, elle compte plus de 130 millions d’utilisateurs actifs par mois en Chine. Elle détient notamment le droit exclusif de rediffusion en Chine des Championnats du monde du « League of Legends » pour une durée de trois ans contre 113 M$. Le cours de Bilibili n’est pas impacté par la crise financière liée au covid-19 mais repartie à la hausse, il s’élève actuellement à plus de 28$, contre 21,81$, la veille du confinement général en Chine continentale, représentant ainsi une augmentation de 28,4 %.
En complétant l’opération capitalistique, Bilibili et Sony concluront un accord de collaboration commerciale dans le domaine des activités de divertissement sur le marché chinois, y compris les jeux vidéo et mobiles.
Matières premières : Tianqi (Chine / Australie)
Coté à Shenzhen, la société chinoise Tianqi Lithium souhaiterait à vendre des actifs pour rembourser sa dette accumulée dans une expansion mondiale audacieuse. Il cherche un repreneur pour ses 51 % dans Talison Lithium, propriétaire de la mine Greenbushes, l’une des plus importantes mines de lithium située en Australie-Occidentale, selon le FT. L’américain Albemarle détient le solde de 49 %. Après une chute des prix du lithium, Tianqi a rencontré une difficulté de liquidité. La société chinoise a enregistré une perte nette l'an dernier de 2,82 milliards de yuans (400 M$) contre un résultat net de 2,2 milliards de yuans en 2018. Elle a surtout contracté un endettement de 3,5 Md$ auprès de la banque chinoise Citic Bank en 2018 pour financier l’acquisition du chilien SQM, qui exploite le lithium dans le désert d'Atacama, dans le nord du Chili, l'un des plus grands gisements du monde de lithium (le Chili possède les plus grandes réserves mondiales de lithium avec 52 % du total) (lire aussi notre chronique précédente). L’agence de notaion Moody’s a dégradé sa note de B2 à Caa1.
Statistiques : la reprise de VC en mars en Chine
Avec le déconfinement progressif en Chine, les activités économiques semblent avoir vivement repris et le redémarrage des VC y est concomitamment effectué. D’après les statistiques de l’AVCJ, les levées de fonds de capital-risque en Chine se sont intensifiées le mois dernier. Les start-ups et entreprises technologiques chinoises ont levé plus de 2,5 Md$ au cours du mois dernier, soit une multiplication par plus de six par rapport à 410 M$ en février, selon ces données. Cependant, le montant total de levées de fonds a encore baissé de plus de la moitié pour atteindre 3,8 Md$ au premier trimestre par rapport à la même période en 2019, la crise sanitaire du Covid-19 ayant réellement ralenti les activités de VC dans l'empire du milieu.
Les fonds ont toutefois profité pour investir, notamment dans les secteurs tels que la Biotech et l’EdTech. 1 Md$ de levée a été confirmé pour l’EdTech chinoise Yuanfudao le mois dernier, qui était le témoin du dynamisme du secteur. La plateforme d'éducation en ligne Yuanfudao, soutenue par le géant de l’internet Tencent Holdings, coté à Hong Kong, a réussi un nouveau tour de table d’1 Md$ en plein de crise sanitaire mondiale, sur une base de valorisation de 7,8 Md$ (lire aussi notre chronique précédente). Quant aux levées de véhicules en cours, les LP ont démontré une volonté de continuer à déployer des capitaux malgré l'impact du coronavirus. Très récemment, Qiming Ventures a annoncé un closing final à 1,1 Md$ pour un fonds tech (notamment biotech).
Et aussi :
Le Bureau Chine du cabinet Simon Associés organise un webinar gratuit spécial dédié aux filiales françaises d’entreprises chinoises, managers, entrepreneur individuel chinois ou d’origine chinoise sur le thème "Covid-19 : Faire face à la crise et bien préparer la reprise". Le webinar sera animé en bilingue (chinois et français) par Lara Boursier, associé et responsable du bureau Chine et Bo Han, avocat. Plus de détail
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