En provoquant une interruption de 70% des nouvelles collaborations et un ralentissement de près de 30% des partenariats déjà établis, la crise a imposé un coup de frein brutal aux alliances entre start-up et grands groupes, selon l’étude publiée le 11 juin par Raise et Bain & Cie dans le cadre de leur programme commun David avec Goliath.
C’est la fin de « l’innovation washing » pour les grands groupes mais surtout la douche froide pour les start-up qui dépendent des dépenses discrétionnaires de donneurs d’ordres pris dans la tourmente de la crise sanitaire. C’est ce qu’illustre l’étude menée par « Raise et Bain & Cie » dans le cadre de leur programme « David avec Goliath » auprès de 26 grands groupes et de 120 jeunes entreprises. Selon cette enquête publiée le 11 juin, la crise liée au Covid-19 a provoqué une interruption de 70% des nouvelles collaborations en phase de prospection commerciale et un ralentissement conséquent de près de 30% des partenariats déjà établis. « Derrière ce paysage sombre, se cachent quelques belles histoires de solidarité », nuance toutefois Olivier Marchal, président de Bain & Cie en France, pendant le webinar commentant les résultats de l’étude. 35% des grandes entreprises ont ainsi aidé financièrement leurs jeunes partenaires au travers d’avances de trésorerie ou des paiements rapides, 50% d’entres elles les ont aidés à développer des opportunités commerciales, et 80% ont continué à animer leurs alliances avec de jeunes entreprises en passant en mode virtuel. Par ailleurs, 45% des grandes entreprises ont lancé pendant la crise une initiative citoyenne avec un partenaire start-up.
Le moment de vérité
« Année après année, nous avons encouragé les collaborations entre les « David » et les « Goliath » que sont les jeunes et les grandes entreprises, et démontré combien leurs alliances nourrissaient leur succès commun. La crise sanitaire, économique et sociale provoquée par le Covid-19 est sans précédent, et les alliances, elles aussi, en sortiront transformées», explique Gonzague de Blignières, co-fondateur de RAISE. De fait, la crise a agi comme un révélateur des faiblesses mais aussi des forces des alliances établies: pour les grands groupes, soudainement confrontés à une diminution de leurs moyens, ils ont été forcés de se concentrer sur des résultats importants en passant du "nice to have au must have". Pour les jeunes entreprises, il s’est révélé crucial de solidifier et valoriser leur offre cœur de métier auprès de leurs clients. Message bien reçu côté startup : « Pour les 24 prochains mois, l’attention sera portée sur comment nous nous vendons et nous rendons indispensables », assure Quentin Guilluy, co-fondateur d’Andjaro, éditeur d’une plateforme de transfert ponctuel de collaborateurs. En remettant la création de valeur au cœur des priorités, la crise a certes montré la nécessité d’adapter les alliances entre grandes et jeunes entreprises, mais elle a aussi établi la pertinence de ces dernières. En effet, 95% des grandes entreprises jugent les alliances avec des start-up toujours pertinentes voire déterminantes pour la reprise économique. A l’avenir seront favorisées les alliances jugées essentielles à la création de valeur pour l’activité actuelle ou pour la reprise.
Et le M&A dans tout ça ?
Le secrétaire d’Etat chargé du numérique Cédric O, présent au Webinar, n’a pas manqué de soulever l’épineuse question des stratégies de M&A de grands groupes vis-à-vis des start-up, dont il constate une absence préoccupante, laissant ce terrain de jeux aux seuls Gafa. Le responsable de la transformation et de l’innovation chez Casino, Martin Calmels, ainsi que son homologue chez Carrefour Mathieu Benkerant ont défendu leurs positions en assurant mener une stratégie d’acquisitions ciblée mais attentive à ne pas priver les start-up de leur marché, risque inhérent à toute prise de participation capitalistique.