Abivax réussit un pari audacieux dans un contexte compliqué pour les biotech. Après avoir collecté 49,2 M€ en septembre dernier, notamment auprès d’investisseurs américains, pour lancer les essais cliniques de phase III de son premier candidat médicament pour traiter la rectocolite hémorragique, la société réussit à se financer à hauteur de 130 M€. Elle a émis 20 millions d’actions nouvelles représentant 90 % de son capital au prix du marché (6,5 €) et son offre a été sur-souscrite. « Le potentiel énorme d’obefazimod, le produit phare de la société, est à l’origine de cet engouement », assure Philippe Pouletty, co-fondateur d’Abivax et de Truffle Capital, qui reste le premier actionnaire de la société (12 %) mais n’a pas contribué à ce tour mené par TCGX. L’investisseur de Palo Alto dédié aux avancées médicales qui avait déjà conduit le tour précédent entraine cette fois avec lui des investisseurs existants - Invus, Deep Track Capital, Sofinnova Partners, Venrock Healthcare Capital Partners- ainsi que des nouveaux à l’instar des américains Great Point Partners LLC, Deerfield Management Company, Commodore Capital, Samsara BioCapital et Boxer Capital.
1200 patients et 600 centres investigateurs
L’essentiel de cette levée de fonds est destiné à financer l’étude de phase III. Cette dernière phase avant l’accès au marché, a démarré à l’automne et va se dérouler sur 1200 patients dans 600 centres en Amérique du Nord, en Europe, Amérique latine et dans la région Asie Pacifique. Elle fait suite à la phase II qui avait fait état d’un taux de rémission à un an de 55 % à 62 % chez des patients dont la moitié était en échec aux anticorps monoclonaux et/ou aux inhibiteurs des Janus Kinases. Le traitement est basé sur une petite molécule qui stimule la production d’un puissant inflammatoire, le microARN miR-124, à même de freiner les cytokines.
Trouver encore 101 M€
Sur cette seule indication de la rectocolite hémorragique, obefazimod adresse un marché potentiel de 5 à 10 Md$, signale Philippe Pouletty. En ajoutant les autres indications sur lesquelles Abivax travaille -polyarthrite rhumatoïde, maladie de Crohn-, « ce marché pourrait atteindre les 90 Md$ ». Mais il reste encore quelques étapes à franchir avant même l'étape d'accès au marché qui n'a pas encore été chiffrée. L’augmentation de capital d’un montant net de 123 M€ finance les besoins d’Abivax jusqu’à la mi-2024. Toutefois, la biotech sait d’ores et déjà qu’elle devra trouver 31 M€ supplémentaires pour obtenir les premiers résultats (phase d’induction du traitement) et ensuite encore 70 M€ pour mener à terme les essais de la phase de maintenance du traitement de la rectocolite hémorragique attendus fin 2025. Pour obtenir ces sommes la société envisage plusieurs solutions parmi lesquelles de nouvelles augmentations de capital, la souscription d’emprunt voire même la conclusion d’accords de licences régionales pour son produit notamment en Asie. Le marché a plutôt bien accueilli l’opération puisque le cours de la société s’est apprécié de plus de 6 % ce jour, sa capitalisation s’établissant à 152,8 M€ en fin de journée.