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Reprises à la barre, des opportunités à saisir Accès libre

Dans un contexte d'augmentation des défaillances, intégrer le distressed M&A à une stratégie de build-up peut permettre d'acquérir de belles endormies à faible coût, à condition de respecter les dispositions du code de commerce et de bien identifier les zones de risque.

| 1539 mots

Hadrien de Lauriston, Jeantet

Dans un contexte économique morose et incertain, une stratégie de croissance par build-up constitue une alternative efficace, ou à tout le moins complémentaire, à la croissance organique qui peut s’avérer longue et aléatoire. Cette approche permet d’accroître rapidement des parts de marché, d’étendre son maillage territorial, d’optimiser les synergies et de générer des économies d’échelle avec un risque d’exécution maitrisé puisque l’acquéreur s’appuie sur une activité existante.
Reste à trouver les cibles adéquates ce qui n’est pas toujours simple. 
Parmi les cibles potentielles, figurent les entreprises en difficultés qui ont besoin de trouver un nouveau partenaire pour rebondir et assurer leur pérennité. C’est ce qu’on appelle en bon français le « Distressed M&A » dont font partie les reprises à la barre du tribunal. Et on aurait tort d’exclure par principe ce type d’actifs, bien que ces opérations puissent apparaitre complexes et risquées, car quelques belles endormies peuvent se cacher derrière une masse d’entreprises moribondes et sans avenir.

Les reprises à la barre ou reprises d’activité en plan de cession consistent à racheter non pas la société elle-même mais uniquement son fonds de commerce, sans dette ou presque, par l’effet d’un jugement.
Une étude de KMPG de juin 20191 relevait qu’entre 2017 et 2018 483 plans de cession d’entreprise de 20 salariés ou plus ont été arrêtés par les tribunaux de commerce. Chaque semaine, ce sont des dizaines d’entreprises, de toute taille et de tout secteur, qui cherchent des candidats à la reprise. Certaines font l’objet d’âpres combats entre candidats mais bon nombre sont liquidés faute de repreneurs ou cédées à des prix symboliques.
Ces opérations de reprise présentent de nombreux avantages et de belles opportunités de croissance pour autant que le repreneur maîtrise le processus et ait fait une analyse approfondie des risques tant juridiques qu’opérationnels.

Un processus strictement encadré...

Le processus de reprise d’entreprises à la barre du tribunal est strictement encadré par les dispositions du code de commerce et est conduit sous la supervision du Tribunal. S’il peut être préparé dans le cadre d’une procédure amiable et confidentielle - on parle alors de prepack cession - il est mis en œuvre en procédure collective. Les principales étapes sont les suivantes : 

1) Diffusion d’une annonce de recherche de repreneurs et fixation de la date limite de dépôt des offres : Le délai entre la publicité et la date limite de dépôt des offres varie d’un dossier à l’autre, en fonction notamment de la situation de trésorerie de l’entreprise cible et peut parfois être très court. Pendant ce délai, les candidats, après signature d’un engagement de confidentialité, ont accès à une data room pour leur permettre de construire leur offre. 

2) Dépôt des offres de reprise par les candidats entre les mains de l’administrateur judiciaire. Les offres sont déposées par l’administrateur judiciaire au greffe du tribunal où toute personne intéressée peut venir les consulter. 

3) Fixation d’une date d’audience d’examen des offres de reprise : Les candidats ont alors jusqu’à 2 jours ouvrés avant ladite audience pour améliorer leur proposition. Seules les modifications dans un sens plus favorable sont autorisées, il n’est pas possible de dégrader son offre. Dans cette période, dont la durée varie également d’un dossier à l’autre, les candidats poursuivront leurs audits et auront l’occasion d’échanger avec les représentants des salariés et les organes de la procédure collective.

4) Examen des offres de reprise par le Tribunal lors d’une audience à laquelle les candidats sont invités à soutenir leur projet. 

5) Jugement arrêtant le plan de cession au profit du candidat jugé comme le plus à même de maintenir l’activité, préserver l’emploi et apurer le passif.

6) Entrée en jouissance. Elle peut intervenir dès la date du jugement arrêtant le plan de cession.

... Qui présente de nombreux avantages

Le principal intérêt d’une reprise en plan de cession est la possibilité offerte aux candidats de définir très précisément le périmètre de reprise, qu’il s’agisse des actifs, des contrats ou des effectifs. Ainsi, une reprise en plan de cession est la possibilité d’opérer une restructuration en profondeur de l’entreprise, sans coût pour le repreneur puisque les contrats non repris par le repreneur seront résiliés par le liquidateur judiciaire aux frais de la procédure et c’est l’administrateur judiciaire qui mettra en œuvre les licenciements des salariés non repris aux frais, là encore, de la société en procédure collective. 
C’est ainsi l’occasion de réduire des coûts de structure trop élevés, d’arrêter des activités non rentables ou encore de réajuster la masse salariale pour tenir compte de l’activité de l’entreprise et des synergies envisagées avec le repreneur.

Ensuite, une reprise d’entreprise est une reprise d’actifs uniquement, sans le passif de la société. Ainsi aucune des dettes de la société soumise à la procédure collective, dettes bancaires, dettes fournisseurs, dettes fiscales et sociales…. n’est transférée au repreneur2. Enfin, compte tenu de la situation de l’entreprise et du délai contraint pour réaliser la cession, les entreprises cédées le sont le plus souvent à des prix très faibles. Selon l’étude KPMG précitée, le prix de cession équivaut, en moyenne, à 6 % du chiffre d’affaires de l’entreprise concernée.

Identifier les zones de risque

Si les audits juridiques et financiers peuvent être nettement allégés par rapport à une acquisition classique compte tenu d’absence de reprise des passifs, il ne faut pas négliger cet aspect pour, d’une part, être en mesure de définir un périmètre de reprise pertinent et viable et, d’autre part, comprendre l’origine des difficultés et identifier les risques associés aux actifs repris. Or, bien souvent les informations disponibles sont incomplètes ou obsolètes, rendant l’évaluation de l’actif plus complexe et moins précise. Ensuite, il est important de bien mesurer l’impact de la procédure collective sur la valeur du fonds de commerce : Face à l’incertitude ou compte tenu de retards de livraison, des clients ont pu trouver des solutions alternatives, des fournisseurs impayés ont pu décider d’arrêter toute livraison ou encore, des salariés clés ont pu quitter l’entreprise… Par ailleurs, si le principe est celui de la non reprise du passif de l’entreprise, il peut y avoir certains passifs, plus ou moins cachés, qui suivront le fonds racheté. Ainsi par exemple des actifs soumis à une clause de réserve de propriété qui devront être payés pour pouvoir être exploités ou bien encore des dettes d’acquisition lorsque le bien acquis a été donné en garantie au profit du prêteur.
Attention également aux obligations en matière sociale. Si le nombre de postes repris est défini par le repreneur, les contrats de travail sont repris aux conditions existantes avec reprise de l’ancienneté. Par ailleurs, la reprise des droits acquis par les salariés, qui peuvent représenter des charges très conséquentes dans certains dossiers, sera souvent un élément déterminant dans le choix du repreneur. Ils sont repris dans près de la moitié des dossiers. 

Vecteur d'accélération

Enfin, le financement de la reprise peut s’avérer particulièrement lourd. D’abord, il sera difficile d’obtenir des financements bancaires pour ce type d’opération. Ensuite, il faut prévoir de pouvoir financer intégralement le besoin en fonds de roulement puisqu’aucune créance ne peut, en principe, être reprise et, a fortiori, il faudra très souvent reconstituer le stock qui aura été consommé pendant la procédure collective. Enfin, parce que de nombreuses dépenses d’investissements pourront ne pas avoir été effectuées dans les mois précédents la reprise.

En conclusion, si les reprises à la barre ne peuvent bien sûr constituer l’axe unique d’une stratégie de build-up, elles peuvent la compléter utilement dans une logique opportuniste. Bien préparée et encadrée, une reprise à la barre peut permettre une accélération de la croissance pour un budget contenu.

L’augmentation du nombre des défaillances dont la presse se fait régulièrement l’écho va mécaniquement augmenter les opportunités, aux entrepreneurs et leurs conseils de savoir les saisir.

1  KPMG, les reprises à la barre du tribunal, analyse statistique des pratiques en plan de cession 2017-2018, Pascal Bonnet et Julien Sortais, juin 2019

2  Sous réserve de quelques exceptions

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