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Restructuring : la fiducie bâtit son royaume


| 1365 mots

Encore neuve et imparfaitement maîtrisée, la fiducie s'invite dans la restructuration des entreprises en difficulté. Notamment au bénéfice des créanciers qui peuvent l'utiliser comme arme "anti-sauvegarde".

La fiducie a peut-être connu un retard à l’allumage, mais à en croire l’affluence, jeudi dernier, au deuxième colloque annuel de l’Association Française des Fiduciaires, il n’est plus permis d’en douter : cette technique inspirée du trust anglo-saxon, introduite en France par une loi de 2007, rencontre désormais un franc succès. Organisé sur le thème de la restructuration, l’événement a fait salle comble en attirant plus de 200 participants au Cercle de l’Union Interalliée. Et tant pis si le nouvel intérêt que suscite celle baptisée « reine des sûretés » doit beaucoup à la crise. Franck Gentin, président du Tribunal de commerce de Paris, s’est d’ailleurs chargé de souligner l’importance des enjeux financiers : pour sa seule juridiction, les procédures préventives et collectives ont respectivement porté sur 4,1 Md€ et 1,2 Md€ de passif sur les huit premiers mois de l’année 2014 (contre respectivement 7 Md€ et 1 Md€ environ en 2013).

Divers emplois

Mais le contexte qui favorise la fiducie n’est pas seulement d’ordre économique, mais également législatif. Rappelons que la fiducie, dans une restructuration, sert à sécuriser le remboursement de la new money et/ou le processus de cession d’actifs destinés à ce remboursement, ou encore à sécuriser le processus de vente de la société, dans le cas où l'actionnaire ne peut plus la soutenir. Or ces objectifs intéressent particulièrement les créanciers, face à un droit des procédures collectives que d'aucuns estiment très défavorable à leur égard. A l'exemple de Franck Gentin : « Les créanciers n’ont tout simplement pas leur mot à dire. En plus, les procédures collectives influencent largement l’environnement dans lequel les procédures amiables se déroulent. Et celles-ci laissent souvent le sentiment que leur accord est obtenu sous la contrainte, de crainte d’être encore plus mal traités autrement. » Et notamment dans le cadre des plans de sauvegarde, qui se caractérisent actuellement par « la longueur des délais et des write-off quasi systématiques sur les dettes », a ajouté le magistrat (photo ci-contre).

Arme « anti-sauvegarde »

Aussi la fiducie a-t-elle pu être qualifiée par certains « d’arme anti-sauvegarde », en ce qu’elle permet d’arriver à un accord plus équitable durant les négociations amiables. Mieux, la fiducie aurait même réussi ce que n’a pas osé faire, en mars dernier, la dernière ordonnance réformant le droit des entreprises en difficulté, à savoir introduire la possibilité de forcer l’éviction d’un actionnaire opposé à l’exécution d’un plan. En la matière, c’est le Ciri qui a ouvert la voie, à travers trois dossiers où il a couplé l’utilisation d’une fiducie-gestion à l’emploi d’une golden share (à laquelle est rattaché un droit de vote majoritaire). Dans le schéma envisagé, le fiduciaire, détenteur de cette dernière, s’est vu donner la responsabilité et l’obligation de rechercher un acquéreur, au cas où l’entreprise ne parviendrait pas à rembourser ses créances publiques. « Son mandat se déclenche sous certaines conditions inscrites dans le contrat, semblables à des convenants bancaires », a souligné Jérôme Chevalier, rapporteur du Ciri. Conçu à titre préventif, le contrat signé par le Ciri donne l’opportunité au dirigeant de rechercher lui-même l’acquéreur dans un premier temps, et lui accorde également un droit repentir, au cas il trouverait, au pied du mur, l’argent nécessaire au remboursement. « C’est ce qui s’est passé avec notre dernier dossier. Le schéma est assez vertueux… », a commenté Jérôme Chevalier.

Un instrument de la confiance

Les créanciers, très largement représentés au colloque de l’AFF, ont toutefois tenu à souligner qu’une fiducie ne se fait pas à leur unique avantage. Mais aussi à celui de toutes les parties prenantes à une restructuration, et donc au bénéfice de l’entreprise en général. Pascal Rouzee, managing director Restructuring et Distressed Debt au Crédit Agricole CIB, en a fait l’expérience dans un dossier initialement miné par la défiance réciproque des protagonistes. Jusqu’à ce qu’apparaisse l’éventualité d’une fiducie-gestion. « Dès lors que l’attention s’est portée sur le contenu de la mission d’un fiduciaire, les tensions se sont de suite apaisées et les discussions sont devenues constructives. » En déplaçant le terrain des négociations, la fiducie pourrait s’avérer un moyen de débloquer une situation conflictuelle. « Et plus la confiance revient vite, plus on peut traiter un dossier dans sa phase amont », a rappelé Pascal Rouzee (photo ci-contre). Un bénéfice auquel les juges des tribunaux devraient également être sensibles. Surtout dans les procédures amiables où, contrairement aux procédures collectives, ils n’ont pas de prise sur le cours des négociations. « A priori, les juges verront d’un bon œil un outil qui sécurise un processus et accroît ainsi ses chances d’arriver à terme, que ce soit dans l’objectif d’une cession d’actifs ou d’un adossement », a estimé Franck Gentin.

Quelques ratés côté LBO

Loin de s’adonner à l’autosatisfaction, le colloque s’est aussi fait l’écho des schémas qui n’ont pas fonctionné. A l’instar de ceux conçus pour des entreprises sous LBO, où des prêteurs ont conditionné le rééchelonnement de la dette à la mise en place d’une fiducie-sûreté. Et ce dans le but de se sécuriser ultérieurement, si la situation nécessite de vendre la société. Mais dans ce cas, l’intention de l’acquéreur potentiel n’est pas d’éponger des dettes LBO, mais plutôt d’injecter de la new money directement dans l’entreprise, avec un rang de super-senior. S’ensuit donc la mise en place d’un nouveau « waterfall », avec un nouvel horizon d'investissement auquel les dettes préexistantes doivent s’adapter, ce qui oblige à renégocier le contrat de fiducie. Le hic, c’est que ces contrats ont été conçus pour être modifiés à l’unanimité. Et comme ils impliquent tous les créanciers, y compris un dirigeant détenteur d’obligations ou de comptes courants, ils reviennent à donner à n’importe quel minoritaire le pouvoir de bloquer la vente. « C’est une erreur de jeunesse que les praticiens ont commise », a reconnu l’administrateur judiciaire Frédéric Abitbol (photo ci-contre). « On en tirera évidemment les leçons, et les prochains contrats seront modifiables à la majorité. On pourra alors s’interroger sur ce qui définit une majorité, ce qui promet d’autres sujets de négociation passionnants », a-t-il prédit.

Intégration fiscale en jeu

De fait, les professionnels de la restructuration cherchent encore leurs marques dans le nouveau royaume de la fiducie. Et n’en font pas mystère. « La fiducie est encore trop récente, et ses effets trop puissants pour nous dispenser de nous assurer en permanence de l’impact éventuel des schémas fiduciaires sur l’ordonnancement juridique, et vice versa », a tenu a rappelé Jean-Marie Valentin, associé du cabinet Sekri Valentin Zerrouk (photo ci-contre). « Nous sommes condamnés à être, certes, innovants et créatifs, mais surtout extrêmement prudents et fins techniciens. A défaut, nous risquerons de créer des monstres juridiques qui seront tôt ou tard rejetés par le marché et, bien évidemment, pas les juridictions », a-t-il prévenu. A noter que parmi les questionnements qui préoccupent les praticiens figurent encore le régime de l’intégration fiscale - quid de sa validité lorsqu'un groupe place une filiale en fiducie ? Mais Bercy, selon le rapporteur du Ciri, devrait prochainement produire un rescrit fiscal en la matière, voire même annoncer une évolution de la doctrine fiscale. Une nouvelle accueillie par un murmure approbateur de l’assistance.

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