Sanctionnés durement par le marché les fonds ont perdu plus de 60 % de leur valeur sur un an. Etat des lieux et tableau exclusif
Alors que l'on parlait de "résultats mitigés" concernant la performance des fonds cotés au premier semestre 2008 (voir article ci-dessous), il ne serait pas exagéré de parler de véritable cataclysme depuis. Eurazeo, Wendel , Altamir-Amboise ont perdu plus de 75 % depuis un an. IPO, OFI et IDI respectivement 69 %, 66 % et 59 % (voir tableau ci-dessous). Personne n'est épargné. Une hémorragie qui a certes marqué l'ensemble des places financières - le CAC 40 a perdu 42 % de sa valeur entre le 1er septembre 2008 et le 1er mars 2009 -, mais qui frappe d'autant plus les sociétés d'investissement cotées, tant leur valorisation boursière est en décalage avec le niveau de leur sous-jacent. "Les investisseurs ont adopté une attitude identique de défiance à l'égard de tous les fonds cotés, sans prendre en compte la réalité de leur situation d'endettement ou de leur portefeuille", déplore Philippe Audouin, le DAF d'Eurazeo (photo ci-dessous).
Effet multiplicateur pour les fonds cotés
Faillite de Lehman Brothers, renflouements massifs des banques américaines et européennes, affaire Madoff... Depuis septembre dernier, les spéculateurs en Bourse ont reçu un flot sans précédent de mauvaises nouvelles de grande ampleur. Devant de telles révélations et la contraction du crédit bancaire, l'irrationalité du marché a joué un effet multiplicateur pour les fonds cotés: très rapidement, les investisseurs se sont placés à la vente dans un mouvement de panique généralisé sur l'état de santé de l'économie et des banques, d'où une réaction fortement baissière des marchés. Dans ce contexte le monde financier, et plus particulièrement les fonds d'investissement réputés exposés à la dette, sont apparus comme les placements à honnir. "La raréfaction de la dette a signifié pour beaucoup la fin des LBO, alors qu’il est encore possible de monter des opérations avec des leviers raisonnables", relate Monique Cohen, directeur associé chez Apax.
Fonds cotés: chute de 20 points de plus que le CAC 40
Bertrand Rambaud, Siparex
Décalage d'horizon
Ce que les fonds d'investissement déplorent, c'est un véritable décalage entre la vision court-termiste des investisseurs en Bourse, et l'horizon des acteurs du private equity qui investissent sur cinq à sept ans, parfois plus. "En raison du ralentissement économique, les marchés ont anticipé une baisse des performances du portefeuille. C'est la raison pour laquelle en période de crise, la décote est plus importante entre les titres des fonds et de leurs sous-jacents ", explique Christian Langlois-Meurinne, P-dg de l'IDI (photo ci-contre). En outre, les marchés sanctionnent des activités qu'ils ne comprennent pas toujours: devant un portefeuille varié de sociétés, s'installe un soupçon d'opacité que les investisseurs ont parfois du mal à éclaircir. "Il y a un travail d'explication à faire sur notre métier, qui offre un accès diversifié à un portefeuille géré par des professionnels avertis", indique François Lombard, président de Turenne Investissement.
L'exemple le plus frappant à cet égard est celui d'Altamir-Amboise, le véhicule coté d'Apax, qui a perdu 45 % de sa valeur en un jour le 13 mars dernier, lorsqu' a été annoncé une procédure de sauvegarde sur Financière Hélios, holding de tête du producteur de cleantech Séchilienne-Sidec. "Nous avons eu tort de penser que le marché comprenait ce qu’était le mécanisme de la procédure de sauvegarde", explique Monique Cohen, directeur associé chez Apax (photo ci-contre). Les marchés ont néanmoins su faire la différence entre Financière Hélios et Séchilienne-Sidec, dont le titre n'a pas subi de baisse après cette annonce.
Les intérêts de la cotation demeurent
Jean-Bernard Meurisse, Initiative & Finance
Après la désaffection, le rebond?
Olivier Millet, Eurazeo PME
Plus de 93 % de baisse pour KKR, Candover...
Les fonds français n'ont pas enduré seuls cette purge. Tous les acteurs du private equity ont trinqué. 3i recule de 67 % en un an, les américains KKR et American Capital et l'anglais Candover ont subi une véritable hécatombe, perdant respectivement 93, 94 et 95 % de leur valeur depuis mars 2008.
Cours de bourse de dix fonds d'investissement français cotés depuis un an
31/03/08 | 30/09/08 | 31/03/09 | Variation en % entre 31/03/08 et 31/03/09 | |
Eurazeo | 77,1 | 59,1 | 19 | -75,3 |
Wendel | 79,5 | 55,6 | 19,3 | -75,7 |
Altamir Amboise | 6,3 | 5,4 | 1,3 | -78,7 |
Turenne investissement | 7,2 | 5,8 | 3,5 | -51,8 |
OFI PE | 10 | 9,2 | 3,3 | -66,5 |
IDI | 30,7 | 24 | 12,6 | -58,9 |
Initiative & finance | 85,9 | 74 | 53 | -38,2 |
Siparex | 26,9 | 19 | 14 | -47,9 |
Avenir Finance | 12,5 | 6,4 | 3,7 | -69,9 |
IPO | 74 | 61,6 | 40,7 | -45 |
CAC 40 | 4707 | 4032 | 2807 | -40,3 |
Total | -60,8 |
Source : CFnews, Boursorama
Fonds cotés: résultats mitigés au premier semestre (29/08/2008)
Valorisation: les multiples du 1° semestre dans la tourmente (01/10/2008)