Fonds et LPs, déjà impliqués sur l'ESG, s'engagent à être plus transparents, notamment sur le risque climatique. Ce mouvement de fond ne peut que consolider la valeur des actifs à long terme, selon Emmanuel de la Ville et Emmanuel Parmentier, associés Exfi Partners.
A l’heure de la COP21, la question du financement de la transition énergétique a été au cœur des débats. Les besoins se chiffrent en milliers de milliards de dollars et la mobilisation des financements privés est une condition sine qua non de la transition. En outre, la loi du 17 août 2015 pour la transition énergétique est une étape supplémentaire d’un mouvement engagé par le législateur depuis une décennie. Elle vient compléter la loi Grenelle 2 (art. 224) obligeant les sociétés de gestion à déclarer la manière dont elles prennent en compte les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans leurs investissements. C’est désormais l’ensemble des gestionnaires d’actifs et des investisseurs institutionnels français qui seront concernés par cette obligation de transparence. Laquelle se fait plus précise, plus exigeante et met l’accent sur le risque climatique. Nouvelle exception culturelle française ? Non, cette loi fait écho à un mouvement de fond, mondial, engagé depuis plusieurs mois dans le secteur financier.
La finance à un tournant
Aux côtés des investisseurs responsables depuis plusieurs années pour les aider à intégrer les enjeux ESG dans leurs participations, ExFi Partners est aux premières loges de cette révolution silencieuse. Il s’agit maintenant de les accompagner vers une gestion moins énergivore. Le risque carbone (et, au-delà, le risque climat, affectant notamment les chaînes logistiques ou les récoltes agricoles) est devenu une réalité pour nombre d’investisseurs dans le monde. De plus en plus nombreux sont les financiers considérant que le modèle des géants de l’hydrocarbure est menacé et, avec lui, celui des indices boursiers où ces industries pèsent un poids majeur.
Le Montreal Carbon Pledge
Plusieurs initiatives mondiales lancées à l’automne 2014, au premier rang desquelles le Montreal Carbon Pledge, le Global Investor Statement on Climate Change et la Portfolio Decarbonization Coalition, réunissent aujourd’hui plusieurs centaines d’investisseurs représentant plusieurs milliards de dollars d’actifs. Le Montreal Carbon Pledge, par exemple, engage sa centaine de signataires à publier l’empreinte carbone de leur portefeuille d’investissement et à établir une stratégie pour la réduire. Parmi eux de nombreux investisseurs majeurs en private equity en France (Bpifrance, la Caisse des Dépôts, CNP, FRR, Ircantec, ERAFP, etc.) ou à l’international (APG, CALPERS, PGGM, etc.) Enfin, de nombreux investisseurs ont annoncé ces derniers mois leur désengagement total ou partiel des actifs liés au charbon (pour n’en citer que quelques-uns : Axa, Aviva, Crédit Agricole, SCOR, etc.) sous la pression des opinions publiques.
Un puissant levier de transformation
L’extension à tous les investisseurs, via l’article L173 de la loi de transition énergétique, de l’obligation de reporting ESG et l’accent mis sur les enjeux climatiques sont des mesures vertueuses, de nature à enclencher un mouvement massif de réduction de l’empreinte carbone des investissements. Nos clients, une fois mesurées l’empreinte carbone de leurs actifs et/ou leur exposition au risque carbone, en tirent les conséquences opérationnelles. Soit en décidant de réallouer leurs investissements vers des actifs moins carbonés, soit en pratiquant un engagement actionnarial plus actif, incitant leurs participations à prendre des mesures pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.
Une nécessaire vigilance
Attention, il convient de ne pas confondre urgence et précipitation. D’où l’intérêt des précisions demandées par l’article L173 et son futur décret d’application : critères pris en compte, informations utilisées, méthodologie, résultats de l’analyse, prise en compte de ces analyses dans la politique d’investissement et, le cas échéant, dans la politique d’engagement auprès des entreprises ou sociétés de gestion. Nous qui accompagnons au quotidien les investisseurs savons bien la difficulté à choisir les critères et les méthodologies pour refléter une réalité avérée. Nous ne pouvons donc que nous féliciter de la clarification qu’apportera au marché le nouveau cadre règlementaire. Nous sommes convaincus que cela conduira à la fois à consolider la valeur à long terme des actifs financiers et à soutenir la transition de nos sociétés vers un avenir moins carboné.
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